Arrêt n°1022 du 4 décembre 2019
(18-50.073) - Cour de cassation - Première chambre civile
- ECLI:FR:CCASS:2019:C101022
SANTÉ
PUBLIQUE
Cassation sans renvoi
Demandeur(s) :
M. le procureur général près la cour d’appel de Paris
Défendeur(s) :
M. A... X... ; et autres
Faits et procédure
1.
Selon l’ordonnance attaquée, rendue par le premier président d’une
cour d’appel (Paris, 18 septembre 2018), et les pièces de la
procédure, le 29 avril 2015, le tribunal correctionnel a reconnu
l’irresponsabilité pénale de M. X..., poursuivi du chef
d’agression sexuelle, et ordonné son admission en soins
psychiatriques sans consentement, sur le fondement des articles
122-1 du code pénal et 706-135 du code de procédure pénale. Depuis
le 29 juin 2015, M. X... est en fuite. A la demande du préfet, la
prolongation de la mesure a été ordonnée tous les six mois par le
juge des libertés et de la détention, en application de l’article
L. 3211-12-1 du code de la santé publique.
2.
Par requête du 22 août 2018, le préfet a, de nouveau, saisi le
juge des libertés et de la détention afin qu’il statue sur la
prolongation des soins. Il a produit à cet effet les avis d’un
psychiatre et du collège mentionné à l’article L. 3211-9 du même
code, datés du 6 septembre 2018, préconisant le maintien de la
mesure.
Examen du moyen
Sur le moyen unique du pourvoi incident,
pris en sa première branche
Enoncé
du moyen
3.
Le préfet fait grief à l’ordonnance de mettre fin à la mesure,
alors que « la mainlevée de la mesure de soins ordonnée en
application de l’article 706-135 du code de procédure pénale à la
suite d’un jugement d’irresponsabilité pénale prononcé sur le
fondement de l’article 122-1 du code pénal, ne peut être ordonnée
qu’après avoir recueilli deux expertises établies par les
psychiatres inscrits ; qu’en ordonnant la mainlevée de la mesure
de soins de M. X..., dont l’hospitalisation avait été ordonnée par
un jugement du tribunal correctionnel du 29 avril 2015, qui avait
reconnu son irresponsabilité pénale, pour des faits d’agression
sexuelle pour lesquels il était poursuivi, en raison de
l’abolition du discernement de l’intéressé lors de la commission
des faits, sans avoir recueilli les deux expertises nécessaires,
le premier président de la cour d’appel a violé l’article L.
3211-12, II, du code de la santé publique, dans sa rédaction alors
applicable ».
Réponse de la Cour
Vu
les articles L. 3211-12 et L. 3211-12-1 du code de la santé
publique :
4.
Il résulte de ces textes que le juge ne peut décider la mainlevée
de la mesure ordonnée en application de l’article 706-135 du code
de procédure pénale qu’après avoir recueilli deux expertises
établies par les psychiatres inscrits sur les listes mentionnées à
l’article L. 3213-5-1 du code de la santé publique.
5.
Pour rejeter la demande de poursuite de la mesure à l’égard de
M. X..., l’ordonnance retient qu’aucun renseignement n’a été
fourni par l’administration sur sa situation actuelle, au point
que l’on ignore si le patient se trouve toujours sur le territoire
français, est encore en vie, s’il est possible de présumer que sa
dangerosité n’a pas disparu, ou, au contraire, que plus rien dans
son état de santé ne justifie un enfermement, de sorte qu’il n’est
ni possible ni souhaitable de laisser perdurer durant des années
cette situation.
6.
En statuant ainsi, alors qu’il avait constaté l’absence des deux
expertises requises par la loi en vue d’établir l’absence de
dangerosité du patient, le premier président a violé les textes
susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
7.
Après avis donné aux parties, conformément à l’article 1015 du
code de procédure civile, il est fait application des articles L.
411-3, alinéa 1, du code de l’organisation judiciaire et 627 du
code de procédure civile.
8.
Les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne
reste plus rien à juger.
PAR CES MOTIFS, sans qu’il y ait lieu de
statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE
ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’ordonnance rendue le 18
septembre 2018, entre les parties, par le premier président de la
cour d’appel de Paris ;
DIT
n’y avoir lieu à renvoi ;
Président : Mme Batut
Rapporteur : Mme Gargoullaud, conseillère référendaire
Avocat général : M. Poirret, premier avocat général
Avocat(s) : SARL Meier-Bourdeau Lécuyer et associés
Rapporteur : Mme Gargoullaud, conseillère référendaire
Avocat général : M. Poirret, premier avocat général
Avocat(s) : SARL Meier-Bourdeau Lécuyer et associés