La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté publie son
rapport d’activité pour 2014, le premier depuis sa nomination en juillet
dernier. Il s’agit du septième rapport annuel depuis la création de
l’institution en 2008.
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"J’ai également conscience du travail important entrepris dans le
champ du respect des droits des personnes atteintes de troubles mentaux. Le
législateur, en 2011 et 2013, avait réalisé une avancée en introduisant dans la
procédure un contrôle par le juge judiciaire, garant de ce respect. Mais notre
tâche est de vérifier qu’au quotidien, il n’est pas porté d’atteintes aux
droits de ces personnes que leur état de santé rend particulièrement
vulnérables. Je l’ai dit, je souhaite faire de ce champ un axe prioritaire de mon
mandat. Il existe environ 360 institutions qui dans ce pays reçoivent des
personnes hospitalisées sans leur consentement. Nous en avons contrôlé environ
un tiers. Il nous appartiendra d’ici 2020 d’avoir visité l’ensemble de ces établissements,
quels que soient leurs statuts juridiques dès lors que le consentement des
personnes qui y sont reçues est absent. D’ores et déjà, au cours de l’année
2014, en contrôlant quinze établissements de santé, des aspects notoires ont
été mis en évidence.
[...]
Les suites
données à l’avis du 17 janvier 2013 relatif aux séjours injustifiés en unités
pour malades difficiles
Le
Contrôleur général des lieux de privation de liberté a publié au Journal
officiel du 5 février 2013 un avis relatif aux séjours injustifiés en unités
pour malades difficiles (UMD).
Les
personnes qui «présentent pour autrui un danger tel que les soins, la
surveillance et les mesures de sûreté nécessaires ne peuvent être mis en œuvre
que dans une unité spécifique » peuvent être admises en UMD, établissements
psychiatriques spécialisés.
L’admission
en UMD s’effectue sur décision du représentant de l’État, c’est-à-dire sur décision
du préfet.
La sortie
est aussi décidée par arrêté préfectoral après avis de la commission du suivi médical
de l’UMD estimant que le patient ne présente plus un danger tel qu’il nécessite
son maintien en UMD. Le plus souvent, il est décidé que le patient retourne
dans un service de psychiatrie classique de son établissement d’origine ; la
réglementation pose un délai de vingt jours à cette fin.
Or le CGLPL
a constaté que des patients restent en UMD alors même que la commission de
suivi médical et le préfet se sont prononcés en faveur de leur sortie. Outre le
fait que souvent l’établissement d’origine n’est pas très enclin, par
appréhension spontanée, à réadmettre un patient qui a représenté pour le
personnel un danger, c’est surtout le flou des textes qui ne permet pas de
déterminer l’autorité en mesure d’imposer l’établissement devant accueillir un
patient sorti d’une UMD et laisse place à des tractations aux résultats
aléatoires. Durant ce temps, le patient est obligé de patienter et de rester dans
l’UMD.
Le
Contrôleur général a recommandé aux pouvoirs publics de prendre des dispositions
par voie de circulaire :
–
d’une part,
en rappelant que l’arrêté du préfet mettant fin au séjour en UMD doit être suivi
simultanément de l’arrêté du préfet du département de l’établissement d’origine
réadmettant le malade dans ce dernier ; ces arrêtés s’imposant naturellement à
l’établissement, dont l’inaction engage sa responsabilité vis-à-vis du patient
et des siens ;
-
d’autre
part, en définissant une procédure permettant à l’agence régionale de santé compétente
(ou, en cas de pluralité d’agences, à l’administration centrale), dûment saisie
en temps utile par la direction de l’UMD, le soin de déterminer sans délai, en cas
de doute, l’établissement de retour, le critère essentiel à suivre en la
matière étant la faculté de réadaptation du patient, notamment au regard de ses
liens familiaux, le préfet de département ainsi déterminé devant ensuite
prendre sans délai l’arrêté nécessaire.
Cet avis,
transmis à la ministre des affaires sociales et de la santé le 17janvier 2013 n’a
reçu de réponse ni au 5
février
2013, jour de la publication, ni dans le courant de l’année 2014
Indépendamment
du fait que l’article L.3222-3 du code de la santé publique qui fonde la
création des UMD a été abrogé par la loi du 27 septembre 2013, les UMD demeurent
et sont désormais régies par les dispositions de droit commun relatives aux soins
sans consentement. L’instruction interministérielle du 15 septembre 2014 ne répond
que très partiellement aux demandes exprimées par le CGLPL.
En effet,
cette instruction dispose : «s’agissant des dispositions réglementaires relatives
aux UMD (articles R. 3222-3 à R. 3222-8 du CSP), elles restent pour l’essentiel
applicables mais sont susceptibles d’évoluer à très court terme. Cependant, il
faut d’ores et déjà prendre en considération la jurisprudence du Conseil d’État
(CE, 13 mars 2013, SCP PEIGNOT, n° 354976) selon laquelle « Le représentant de
l’État du département dans lequel une personne est hospitalisée d’office est
compétent pour décider seul, en vertu de ses pouvoirs de police spéciale, du
transfert de cette personne vers un autre établissement, même si ce dernier est
situé dans un autre département. Le représentant de l’État de cet autre
département n’a à prendre, au titre de la procédure de transfert, aucune mesure
d’hospitalisation d’office ». Cette décision invalide l’article R. 3222-2. »
Les deux recommandations exprimées précédemment par le
Contrôleur général aux pouvoirs publics n’ayant pas reçu de réponse précise, la
situation des patients concernés ne s’est guère améliorée. Certains malades
continuent à attendre leur transfert dans un site plus respectueux du maintien
de leurs liens familiaux et de l’évolution favorable de leur état de santé