mercredi 6 mai 2015

mise en ligne du rapport 2014 de la contrôleure générale des lieux de privation de liberté

La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté publie son rapport d’activité pour 2014, le premier depuis sa nomination en juillet dernier. Il s’agit du septième rapport annuel depuis la création de l’institution en 2008.


"J’ai également conscience du travail important entrepris dans le champ du respect des droits des personnes atteintes de troubles mentaux. Le législateur, en 2011 et 2013, avait réalisé une avancée en introduisant dans la procédure un contrôle par le juge judiciaire, garant de ce respect. Mais notre tâche est de vérifier qu’au quotidien, il n’est pas porté d’atteintes aux droits de ces personnes que leur état de santé rend particulièrement vulnérables. Je l’ai dit, je souhaite faire de ce champ un axe prioritaire de mon mandat. Il existe environ 360 institutions qui dans ce pays reçoivent des personnes hospitalisées sans leur consentement. Nous en avons contrôlé environ un tiers. Il nous appartiendra d’ici 2020 d’avoir visité l’ensemble de ces établissements, quels que soient leurs statuts juridiques dès lors que le consentement des personnes qui y sont reçues est absent. D’ores et déjà, au cours de l’année 2014, en contrôlant quinze établissements de santé, des aspects notoires ont été mis en évidence.


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Les suites données à l’avis du 17 janvier 2013 relatif aux séjours injustifiés en unités pour malades difficiles
Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté a publié au Journal officiel du 5 février 2013 un avis relatif aux séjours injustifiés en unités pour malades difficiles (UMD).
Les personnes qui «présentent pour autrui un danger tel que les soins, la surveillance et les mesures de sûreté nécessaires ne peuvent être mis en œuvre que dans une unité spécifique » peuvent être admises en UMD, établissements psychiatriques spécialisés.
L’admission en UMD s’effectue sur décision du représentant de l’État, c’est-à-dire sur décision du préfet.
La sortie est aussi décidée par arrêté préfectoral après avis de la commission du suivi médical de l’UMD estimant que le patient ne présente plus un danger tel qu’il nécessite son maintien en UMD. Le plus souvent, il est décidé que le patient retourne dans un service de psychiatrie classique de son établissement d’origine ; la réglementation pose un délai de vingt jours à cette fin.
Or le CGLPL a constaté que des patients restent en UMD alors même que la commission de suivi médical et le préfet se sont prononcés en faveur de leur sortie. Outre le fait que souvent l’établissement d’origine n’est pas très enclin, par appréhension spontanée, à réadmettre un patient qui a représenté pour le personnel un danger, c’est surtout le flou des textes qui ne permet pas de déterminer l’autorité en mesure d’imposer l’établissement devant accueillir un patient sorti d’une UMD et laisse place à des tractations aux résultats aléatoires. Durant ce temps, le patient est obligé de patienter et de rester dans l’UMD.
Le Contrôleur général a recommandé aux pouvoirs publics de prendre des dispositions par voie de circulaire :
         d’une part, en rappelant que l’arrêté du préfet mettant fin au séjour en UMD doit être suivi simultanément de l’arrêté du préfet du département de l’établissement d’origine réadmettant le malade dans ce dernier ; ces arrêtés s’imposant naturellement à l’établissement, dont l’inaction engage sa responsabilité vis-à-vis du patient et des siens ;
-          d’autre part, en définissant une procédure permettant à l’agence régionale de santé compétente (ou, en cas de pluralité d’agences, à l’administration centrale), dûment saisie en temps utile par la direction de l’UMD, le soin de déterminer sans délai, en cas de doute, l’établissement de retour, le critère essentiel à suivre en la matière étant la faculté de réadaptation du patient, notamment au regard de ses liens familiaux, le préfet de département ainsi déterminé devant ensuite prendre sans délai l’arrêté nécessaire.
Cet avis, transmis à la ministre des affaires sociales et de la santé le 17janvier 2013 n’a reçu de réponse ni au 5
février 2013, jour de la publication, ni dans le courant de l’année 2014

Indépendamment du fait que l’article L.3222-3 du code de la santé publique qui fonde la création des UMD a été abrogé par la loi du 27 septembre 2013, les UMD demeurent et sont désormais régies par les dispositions de droit commun relatives aux soins sans consentement. L’instruction interministérielle du 15 septembre 2014 ne répond que très partiellement aux demandes exprimées par le CGLPL.
En effet, cette instruction dispose : «s’agissant des dispositions réglementaires relatives aux UMD (articles R. 3222-3 à R. 3222-8 du CSP), elles restent pour l’essentiel applicables mais sont susceptibles d’évoluer à très court terme. Cependant, il faut d’ores et déjà prendre en considération la jurisprudence du Conseil d’État (CE, 13 mars 2013, SCP PEIGNOT, n° 354976) selon laquelle « Le représentant de l’État du département dans lequel une personne est hospitalisée d’office est compétent pour décider seul, en vertu de ses pouvoirs de police spéciale, du transfert de cette personne vers un autre établissement, même si ce dernier est situé dans un autre département. Le représentant de l’État de cet autre département n’a à prendre, au titre de la procédure de transfert, aucune mesure d’hospitalisation d’office ». Cette décision invalide l’article R. 3222-2. »
Les deux recommandations exprimées précédemment par le Contrôleur général aux pouvoirs publics n’ayant pas reçu de réponse précise, la situation des patients concernés ne s’est guère améliorée. Certains malades continuent à attendre leur transfert dans un site plus respectueux du maintien de leurs liens familiaux et de l’évolution favorable de leur état de santé