L'émergence du droit constitutionnel de l'enfermement
La revue des droits et des libertés fondamentaux vient de faire paraître un article corédigé par ma collègue Stéphanie Renard et moi relatif à l'émergence du droit constitutionnel de l'enfermement.
Lien : https://revuedlf.com/droit-constitutionnel/lemergence-du-droit-constitutionnel-de-lenfermement/
En voici le début de l'introduction: "D’aucuns auront pu être surpris que, dans son discours de fin de mandat du 2 décembre 2024, le président du Conseil constitutionnel mentionne la décision de 2023 relative à la protection de la dignité des conditions de garde à vue[1] parmi les plus importantes de la consolidation du droit[2]. Jugée « déceptive » par certains y voyant une « dégradation du droit au recours juridictionnel effectif »[3], elle a en effet été reçue comme une « victoire en demi-teinte »[4] ou « un renforcement de façade du régime de protection constitutionnelle de la dignité de la personne gardée à vue »[5].
Comme le souligne son commentaire, cette décision pose pourtant une norme de concrétisation inédite, posée en conséquence du principe à valeur constitutionnelle de sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d’asservissement et de dégradation[6]. Reprise par deux fois depuis lors[7], cette norme exige que « toute mesure privative de liberté [soit] mise en œuvre dans le respect de la dignité de la personne humaine ».
Ce faisant, le Conseil constitutionnel fait explicitement de la sauvegarde de la dignité de la personne humaine la principale norme de référence de son contrôle des règles législatives régissant la claustration, entendue comme l’état d’enfermement des personnes[8].
Une telle utilisation du principe dégagé en 1994 en matière biomédicale[9] pour le contrôle des conditions d’exécution des mesures privatives de liberté n’est certes pas nouvelle. Ce contrôle a en effet été inauguré par la décision n° 2009-593 du 19 novembre 2009 relative à la loi pénitentiaire[10]. Par la combinaison de ce principe et des dispositions de l’article 34 de la Constitution, le Conseil constitutionnel avait alors dégagé « une obligation positive pour le législateur de déterminer les conditions et les modalités d’exécution des peines privatives de liberté dans le respect de la dignité de la personne » et considéré « qu’il appartient, dès lors, au législateur, compétent en application de l’article 34 de la Constitution pour fixer les règles concernant le droit pénal et la procédure pénale, de déterminer les conditions et les modalités d’exécution des peines privatives de liberté dans le respect de la dignité de la personne ».
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