vendredi 23 novembre 2012

Défendre en justice la cause des personnes détenues (Colloque, CREDOF-CNCDH-OIP, 25-26 janvier 2013, Palais du Luxembourg)

par Serge Slama et Nicolas Ferran
http://combatsdroitshomme.blog.lemonde.fr/2012/11/22/defendre-en-justice-la-cause-personnes-detenues/
Le CREDOF, la CNCDH et l'OIP organisent les Vendredi 25 et Samedi 26 janvier 2013 un colloque intitulé « Défendre en justice la cause des personnes détenues » qui se déroulera au Palais du Luxembourg (Salle Clémenceau) sous la direction de Nicolas Ferran et Serge Slama (esquisse de Philippe Caza pour le colloque)
Depuis une dizaine d'années l'Observatoire international des prisons a été l'un des principal acteur du développement d'une nouvelle « cause juridique » : la défense des personnes détenues en justice – comme le Gisti a contribué depuis trente ans à l'émergence de la cause des étrangers (« 30 ans après le « grand arrêt » Gisti de 1978. Défendre la cause des étrangers en justice (recueil de textes) », Colloque, novembre 2008). Comme le relevait le président Genevois en conclusion de sa contribution à ce colloque, « comment ne pas relever que l’action du Gisti a fait des émules dans des domaines autres que le droit des étrangers. On songe en particulier au droit pénitentiaire et aux actions engagées par la Section française de l’Observatoire international des prisons. Dans un cas comme dans l’autre une action collective à la française permet à un groupement de faire sortir de zones de non-droit des catégories de personnes. Il faut, pensons-nous, s’en féliciter » Le Gisti : requérant d’habitude ? La vision du Conseil d’État » [PDF], GISTI, 30 ans après le « grand arrêt » Gisti de 1978, Défendre la cause des étrangers en justice, Dalloz, coll. « études et documents », 2009, p.79). C'est pour mener une réflexion et un bilan de cette défense en justice de la cause des détenus que le CREDOF, la CNCDH et l'OIP – section française organisent ce colloque les 25 et 26 janvier 2013, sous la direction de Nicolas Ferran, Docteur en droit public et responsable juridique de l'OIP et Serge Slama, maître de conférences en droit public à l'Université Evry-Val d'Essonne & membre du CREDOF, en collaboration avec Nils Monsarrrat, chargé de mission à la CNCDH et ancien du Master Droits de l'homme de Nanterre. Supervisé par un comité scientifique composé de Sabine Boussard, Véronique Champeil-Desplats (CREDOF), Gaétan Cliquennois (CERAPS), Eric Péchillon, Martine Herzog-Evans et Jean-Manuel Larralde (CRDFED), ce colloque reçoit également le soutien du CERAPS (Lille 2), du CRDP (Paris Ouest-Nanterre), du Conseil national des barreaux et du Conseil régional Ile-de-France.

Inscription gratuite et obligatoire
  Préinscription : inscription.colloque@oip.org (indiquez vos noms, prénoms, qualités)
 Une pièce d'identité est exigée pour entrer au Palais du Luxembourg
Dans ce domaine, on ne compte plus en effet, depuis 2003 (CE 30 juill. 2003, Remli, n° 252712, Lebon 366 ; AJDA 2003. 2090 , note D. Costa ; D. 2003. 2331 , note M. Herzog-Evans ; AJ pénal 2003. 74, obs. P. R. ; Rev. sc. crim. 2005. 390, obs. P. Poncela) les arrêts sur les droits et libertés des détenus du Conseil d'Etat (v. pour un bilan général de cette jurisprudence : Xavier Domino, Aurélie Bretonneau, « Custodire ipsos custodes : le juge administratif face à la prison », AJDA 2011 p. 1364) ou de la Cour européenne des droits de l'homme (v. pour des lettres ADL synthétisant la jurisprudence de la CEDH sur ce sujet par Nicolas Hervieu : Cour EDH, G.C. 3 avril 2012, Boulois c. Luxembourg, Req. n° 37575/04 – ADL du 15 avril 2012 , Cour EDH, 5e Sect. 20 janvier 2011, Payet c. Franceet El Shennawy c. France, Req. n° 19606/08 et n° 51246/08 – ADL du 23 janvier 2011 et Béatrice Pastre-Belda, « Le droit européen de la détention et son influence sur le droit national – Conférence du 28 mars 2011 », in Le droit européen des droits de l’homme, Conseil d’Etat, Paris, La Documentation Française, 2011, p. 189). Par ses actions, l'OIP a pris une part prépondérante à cet édifice jurisprudentiel. On dénombre aussi un certain nombre de décisions du juge judiciaire ou du Conseil constitutionnel ou encore d'intervention devant le Comité contre la torture des nations unies. Mais cette justiciabilité change-t-elle réellement les pratiques de l'administration pénitentiaire et contribue-t-elle à améliorer effectivement la condition des détenus (exemple des fouilles corporelles CE, réf. 9 septembre 2011, Garde des Sceaux c/ M. D., n°352372 – ADL du 13 septembre 2011) ?
Dans un premier temps le colloque se propose de faire un bilan historique juridique de la naissance de cette cause. Comme dans d'autres champs des luttes sociales, on a en effet assisté à la transformation des luttes carcérales du champ politique, contestataire et parfois violent, aux luttes juridiques par le recours au droit (Jean Bérard – voir « Libérer des détenus, libéraliser les prisons ? Révoltes des prisonniers et réformes pénitentiaires (1968-1975), in Michel Margairaz, Danielle Tartakowsky (dir.), 1968 entre libération et libéralisation, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2010, pp. 183-200 ; Jean Bérard et Hugues de Suremain, « La gestion des longues peines au révélateur des luttes juridiques », Champ pénal, Nouvelle revue internationale de criminologie, Vol. VI , 2009). Cette conversion à l'action par le droit a contribué à un recul marqué des décisions insusceptibles de recours qui relevaient jusque là de la catégorie des « mesures d'ordre intérieur » (ce bilan de dix années de jurisprudence en faveur des détenus sera dressé par Delphine Costa – v. déjà « La juridictionnalisation des mesures de l’administration pénitentiaire » in Colloque sous dir. Sabine Boussard, Les droits de la personne détenue, 26 et 27 janvier 2012 [à paraître]). Sous la présidence de Liora Israël, des acteurs témoigneront de cette genèse de la « guérilla juridique » et des premiers combats contentieux (Hugues de Suremain), des difficultés de s'opposer à l'administration pénitentiaire en et en dehors de la prison (Gabriel Mouesca, Olivier Vincent) ou encore des stratégies contentieuses développées en liaison avec l'OIP (Patrice Spinosi). La naissance de cette cause sera aussi retracée par d'autres acteurs, qui l'ont vécue de l'intérieur de l'administration pénitentiaire (Kim Reuflet), ou du point de vue d'autorités administratives indépendantes (pour le CGLPL Jean-Marie Delarue représenté par Virginie Bianchi ou pour la CNCDH par Jean-Yves Montfort ).
Seront dans un second temps évoqués, sous la présidence de Serge Slama, les pratiques et spécificités de défense des détenus d'une part s'agissant de l’application des peines (Martine Herzog-Evans voir son blog), du contentieux des conditions de détention mettant en cause la responsabilité de l'Etat (Etienne Noël – voir sur son blog) ou encore des pratiques et difficultés dans l'accès des détenus au juge administratif (Elydia Fernandez) et d'autre part au regard de la situation de certains détenus : les les enjeux liées à la santé des détenus (Eric Pechillon – voir son blog), à la spécificité de la situation des étrangers (Claire Saas – v. par ex. « Quand le pénal envahit le droit des étrangers »,  2004/1 (n° 59-60) ou de l'outre-mer (Dominique Monget-Sarrail) ou à la condition des femmes (Juliette Gaté).
Seront dans un troisième temps évoqués, sous la présidence de Dominique Rousseau, les potentialités et limites de cette défense des détenus en justice. Les difficultés se posent aussi bien sur le plan de l'effectivité et de l'efficacité du contrôle juridictionnel des décisions prises par l'administration pénitentiaire (Nicolas Ferran), dans la gestion juridictionnelle des suicides en prison qui développe certains effets pervers (Gaétan Cliquennois – v. « Empêcher le suicide en prison : origines et pratiques », Sociétés contemporaines, 2009/03 - n° 75 et Cour EDH, Anc. 2e Sect. 6 décembre 2011, Donder et De Clippel c. Belgique, Req. n° 8595/06 – ADL du 11 décembre 2011) ou encore s'agissant de la défense des personnes sous surveillance et rétention de sûreté (Virginie Bianchi). On peut néanmoins déceler des virtualités dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (Anne Gillet) ou encore, dans l'embryon de protection constitutionnelle des détenus (Julien Bonnet).
Le quatrième temps permettra de dresser, sous la présidence de Jean-Manuel Larralde, un panorama de certaines expériences étrangères en matière de défense en justice des droits des détenus dans des systèmes plus avancés (Don Spector du prison law office – sur la class action en Californie. , v. Cour Suprême des États-Unis, 23 mai 2011, Brown v. Plata, 563 US ____ (2011)ADL du 3 juin 2011) ou plus protecteur (Simon Creighton - Grande-Bretagne) mais aussi plus régressif (Anton Burkov – situation en Russie ou Carlos Gonzalez Palacios pour l'Amérique latine).
Enfin, le cinquième temps du colloque dressera, sous la présidence de Frédéric Rolin, un bilan et des perspectives. Bilan de dix années de contentieux des détenus devant la CEDH (Jean-Paul Costa) et des « retombées collatérales » de la défense des détenus sur les autres champs des droits de l'homme (Danièle Lochak). Perspectives des contentieux de demain, pris sous le prisme des contentieux sociaux (Philippe Auvergnon) ou dressées par deux acteurs majeurs dans ce domaine au Conseil d'Etat (Mattias Guyomar) et à la Cour européenne des droits de l'homme (Françoise Tulkens). Jacques Chevallier conclura le colloque. Il aura été ouvert par des représentants des différents partenaires (Cécile Cukierman, pour le groupe communiste républicain et citoyen ; Véronique Champeil-Desplats, pour le CREDOF ; Christine Lazerges, pour la CNCDH et Me Christian Charrière-Bournazel pour le CNB).

 PROGRAMME
 Vendredi 25 janvier 2013
 Ouverture
 (9h15-9h40)
  • Cécile Cukierman, sénatrice de la Loire, groupe communiste républicain et citoyen et Nicole Borvo, ancienne sénatrice (sous réserve)
  • Véronique Champeil-Desplats, professeure de droit public à l'Université Paris-Ouest-Nanterre, directrice du CREDOF
  • Christine Lazerges, professeure de droit privé à l'Ecole de droit de la Sorbonne, Paris 1, présidente de la CNCDH
  • Me Christian Charrière-Bournazel, avocat, président du Conseil national des Barreaux (sous réserve)
  • un.e représentant.e du Conseil régional Ile-de-France (sous réserve)
  • Antoine Lazarus, président de l'OIP
  • Serge Slama & Nicolas Ferran, co-organisateurs
Naissance et développement d'une « cause juridique » : la défense des personnes détenues
 (09h45 – 12h30)
 Présidence : Liora Israël, Maîtresse de conférences à l'EHESS, Centre Maurice Halbwachs
Des luttes politiques aux luttes juridiques dans le champ carcéral par Jean Bérard, agrégé & docteur en histoire (9h50 – 10h10)
  Retour sur dix ans de jurisprudences suscitées par l'OIP sur la défense de la dignité et des droits fondamentaux des détenus par Delphine Costa, professeure de droit public à l'Université d'Avignon (10h10 – 10h30)
 Pause 10 min
Tables ronde 
 (10h40 – 12h30)
1. L'action contentieuse du point de vue de l'OIP et des personnes détenues (10h45 – 11h30)
  • Hugues de Suremain, ancien responsable juridique de l'OIP, doctorant en droit public au CREDOF : Genèse de la naissance de la « guérilla juridique » et premiers combats contentieux
  • Gabriel Mouesca, ancien détenu et ancien président de l'OIP : s'opposer à l'administration pénitentiaire en et en dehors de la prison
  • Olivier Vincent, ancien détenu, témoignage de pratiques contentieuses en détention
  • Patrice Spinosi, avocat aux Conseils, chargé d'enseignement à Sciences Po., membre de l'OIP  : point de vue de l'avocat défendant des détenus au nom de l'OIP

2. Action contentieuse du point de vue des autres acteurs (11h30-12h15
  • Kim Reuflet, vice-présidente chargée fonction de juge des enfants, TGI de Nantes ; Ancienne adjointe au bureau de l'action juridique et du droit pénitentiaire de la Direction de l'administration pénitentiaire, ministère de la Justice (2005-2009) : le développement de l'action contentieuse vécu au sein de l'administration
  • Jean-Marie Delarue, Contrôleur général des lieux de privation de liberté (représenté par Virginie Bianchi, ancienne directrice de prison et contrôleur au CGLPL) : la figure du détenu procédurier
  • Jean-Yves Montfort, conseiller à la Cour de cassation & membre de la CNCDH : le point de la CNCDH
 Débat 12h15-12h30
Pause déjeuner (libre)

 Après-midi
 La défense des détenus en justice en pratique
(13h30 - 16h00)
  Présidence : Serge Slama, maître de conférences en droit public, Université Evry-Val d'Essonne, membre du CREDOF

1. Pratiques de défense des détenus
La défense et la dimension collaborative de l’application des peines : l'éclairage du droit comparé par Martine Herzog-Evans, professeure de droit pénal et sciences criminelles à l'Université de Reims (13h35 – 13h55)
Contentieux sur les conditions de détention : une forme d'action collective ? par Etienne Noël, avocat au barreau de Rouen, secrétaire de l'OIP (13h55-14h15)
 La pratique et les difficultés dans l'accès des détenus au juge administratif par Elydia Fernandez, premier conseiller au TA de Versailles (14h15 - 14h35)

2. Spécificités par catégories de détenus
 Table ronde (14h40 - 15h50)
  • Eric Pechillon, maître de conférences de droit public à l'Université de Rennes 1 : la multiplicité des stratégies contentieuses liées à la santé en détention
  • Claire Saas, maître de conférences de droit privé à l'Université de Nantes : la défense spécifique des détenus étrangers
  • Dominique Monget-Sarrail, avocate au barreau de Créteil et de Cayenne : les détenus outre-mer, l'exemple de la Guyane
  • Juliette Gaté : maître de conférences de droit public à l'Université du Maine : la femme détenue est-elle un homme comme les autres ?
Débat 15h50-16h05
 Pause

Apports et limites de la défense des détenus en justice
 (16h15- 18h30)
Table ronde
 Présidence : Dominique Rousseau, professeur à l'Ecole de droit, Université Paris 1 - Sorbonne
  • Nicolas Ferran, docteur en droit public, responsable juridique de l'OIP : la personne détenue encore à la recherche de son juge
  • Gaétan Cliquennois, post-doctorant au FRS-FNRS (Fond national belge de la recherche scientifique), chercheur associé au CERAPS-Lille 2 : L'approche du suicide par le juge administratif et l'administration pénitentiaire : la marque ou l'oeuvre du pragmatisme d'Etat ?
  • Virginie Bianchi, avocat à la Cour, contrôleur au CGLPL : les difficultés de la défense des personnes sous surveillance et rétention de sûreté
  • Anne Gillet, juriste à la Cour européenne des droits de l'homme : apport et limite de la jurisprudence de la CEDH dans la protection des détenus
  • Julien Bonnet, professeur de droit public à l'Université Evry-Val d'Essonne, Centre Léon Duguit : les perspectives de la protection constitutionnelle des détenus
  Débat 18h15-18h30

 Samedi 26 janvier 2013
 (matinée)
 Regards comparés sur la défense des droits des détenus en justice
 (9h15 -11h00)
 Table ronde
  Présidence : Jean-Manuel Larralde, professeur à l'Université de Caen Basse Normandie, CRDFED
  • Anton Burkov, docteur en droit, Univ. Cambridge, directeur du programme sur les droits humains « I’ve Got Rights project », Chair of the European and Comparative Law Department, University of Humanities (Russie): L'utilisation du droit européens des droits de l'homme pour la défense des prisonniers en Russie (« The use of european human rights law for protection of prisoners rights in Russia)
  • Simon Creighton, bhatt Murphy Solicitors: la défense des détenus en Grande-Bretagne
  • Donald Specter, directeur du Prison law office : la défense des détenus en Californie, l'usage de la class action
  • Carlos Gonzalez Palacios, Doctorant au CREDOF, ATER en droit public à l'Université Paris-Ouest-Nanterre : la défense de la cause des détenus en Amérique du Sud, l'exemple du Pérou
 Débat 10h45- 10h55
  Pause
Bilan et perspectives de la défense de la cause des détenus en justice
 (11h05 – 12h45)
 Présidence : Frédéric Rolin, professeur de droit public à l'Université Paris Sud -Sceaux, avocat à la Cour
 Bilan de dix années de contentieux des détenus devant la CEDH par Jean-Paul Costa, ancien juge et président de la Cour européenne des droits de l'homme, président de l’Institut international des droits de l’homme  (11h05-11h25)
 Les retombées collatérales de la défense des droits des détenus en justice par Danièle Lochak, professeure émérite à l'Université Paris Ouest-Nanterre, membre du CREDOF (11h25-11h45)
Table ronde : le contentieux de demain
 (11h45 - 12h45)
  • Philippe Auvergnon, directeur de recherche au CNRS, Directeur du Centre de Droit comparé du Travail et de la Sécurité sociale, Université Montesquieu - Bordeaux IV : L'exemple du contentieux des droits sociaux
  •  Mattias Guyomar, conseiller d'Etat, professeur associé à l'Université Paris 2 : les perspectives d'évolution de la jurisprudence du Conseil d'Etat
  • Françoise Tulkens, ancienne juge et Vice-Présidente de la CEDH : Quel avenir pour la défense des détenus en droit européen des droits de l'homme ?
Conclusion générale
  • Jacques Chevallier, professeur émérite à l'Université Paris 2, membre du CERSA (12h45 - 13h00)
Le dessin du colloque spécialement conçu par Philippe Caza pour l'OIP et le CREDOF
CREDOF-OIP-CNCDH des 25 et 26 janvier 2013 Défendre en justice la cause des personnes détenus