lundi 15 septembre 2014

La HAS rend un avis favorable au projet de décret visant à supprimer les dispositions règlementaires relatives aux UMD.


www.has-sante.fr – N° SIRET : 110 000 445 00012 – code APE : 8411 Z
Avis n°2014.0082/AC/SEVAM du 3 septembre 2014 du collège de la Haute Autorité desanté relatif au projet de décret relatif aux droits et à la protection des personnes faisantl’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge
Le collège de la Haute Autorité de santé, ayant valablement délibéré en sa séance du 3 septembre 2014,
Vu l’article L161-37 6° du code de la sécurité sociale,
Vu la Loi n° 2013-869 du 27 septembre 2013 modifiant certaines dispositions issues de la loi n° 2011-803 du 5
juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux
modalités de leur prise en charge,
Vu le décret n° 2011-847 du 18 juillet 2011 relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de
soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge
Vu la demande d’avis de la Direction Générale de la Santé du 30 juin 2014 portant sur le projet de décret pris en
application de la Loi n° 2013-869 du 27 septembre 2013,
ADOPTE L’AVIS SUIVANT :
Le décret soumis en projet pour avis à la HAS est nécessaire pour mettre en cohérence les dispositions réglementaires relatives aux soins psychiatriques sans consentement avec les modifications apportées par la loi n°2013-869 du 27 septembre 2013 modifiant certaines dispositions issues de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge,
Le collège de la Haute Autorité de santé est donc favorable à son adoption.
Il souhaite toutefois attirer l’attention des pouvoirs publics sur les deux points suivants :
- Le décret tel qu’il est proposé abroge l’ensemble des dispositions réglementaires encadrant les unités pour malades difficiles (UMD). Le collège rappelle la nécessité de disposer, dans la palette du dispositif de soins, pour des indications exceptionnelles, de services spécialisés, bien repérés au plan national, destinés à des malades difficiles (UMD), nécessité affirmée dans l’audition publique de la HAS sur la dangerosité psychiatrique.
(Recommandation n°62) . Un nouveau cadre juridique serait de nature à faciliter l’atteinte de cet objectif et ainsi à assurer la qualité des soins et la sécurité des pratiques au sein de ces unités.
- Le collège souligne l’intérêt qu’il y aurait à mettre en place un suivi des conditions de mise en oeuvre des programmes de soins et en particulier à évaluer la place et la durée des séjours en hospitalisation à temps plein effectués dans le cadre de ces programmes.
Fait le 3 septembre 2014
Pour le collège :
Le président,
PR J.-L. HAROUSSEAU

dimanche 14 septembre 2014

Mainlevée d’une hospitalisation sous contrainte et transformation en programme de soins





Mainlevée d’une hospitalisation sous contrainte et transformation en programme de soins
CA Bastia, 29 août 2012, X contre Centre hospitalier de Castelluccio, n° 14/00094
"L’hospitalisation complète sous contrainte d’une personne souffrant de troubles mentaux est une décision administrative unilatérale privative de liberté qui autorise l’équipe soignante à user de la contrainte pour engager un traitement nécessaire, adapté et proportionné à l’état de santé du malade. Cette décision permet également de prendre des mesures l’empêchant de quitter l’établissement. Depuis le 1er septembre 2014, la légalité de cet acte administratif individuel doit être examinée par le JLD dans un délai maximal de douze jours à compter de l’admission ou à compter du retour en hospitalisation complète (CSP, art. L. 3211-12-1). Le législateur a en effet souhaité que ce magistrat judiciaire se prononce systématiquement sur la légalité et le bien fondé de cet acte pris par une autorité administrative (préfet ou directeur d’établissement). Le décret n°2014-897 du 15 août 2014 vient d’ailleurs de modifier les articles R. 3211-7 à R. 3211-30 du CSP afin d’organiser au mieux ce procès à l’acte réalisé en urgence.
En l’espèce, le JLD du TGI d’Ajaccio a examiné la légalité d’une hospitalisation complète à la demande d’un tiers (CSP, art. L. 3212-13). Comme il arrive parfois, le juge a été contraint d’ordonner la mainlevée de la mesure pour un motif de légalité externe alors que l’état du patient nécessitait manifestement des soins. Afin d’éviter tout risque d’interruption de la prise en charge, le magistrat a demandé qu’un programme de soins soit mis en place dans les 24 heures. Un psychiatre du centre hospitalier d’accueil a immédiatement rédigé un programme comprenant de très longues périodes d’hospitalisation (5 jours et 6 nuits par semaine à l’hôpital). Le contenu d’un tel programme est juridiquement contestable car assimilable à une hospitalisation complète durant laquelle des sorties de courte durée de moins de 48 heures sont organisées (CSP art. L. 3211-11-1 2°). Il était pourtant difficile d’en rédiger un moins contraignant compte-tenu de l’état du patient.
Ce dernier a immédiatement fait appel afin de contester la légalité de l’ordonnance qui conditionnait la mainlevée d’une décision administrative illégale à la rédaction d’un programme de soins. La cour d’appel de Bastia n’avait donc pas à se prononcer sur la légalité du programme proposé à la suite de l’ordonnance de mainlevée. Selon elle, l’ordonnance rendue en première instance était maladroitement rédigée car il n’est pas envisageable de conditionner une mainlevée. Face à l’illégalité de la mesure, le juge devait uniquement ordonner la fin de la privation de liberté. Il ne dispose pas d’autre pouvoir. Il peut uniquement accorder une journée à l’équipe soignante pour éviter une rupture brutale de la prise en charge. L’article L. 3211-12-1-III du CSP dispose en effet que « lorsqu’il ordonne cette mainlevée, il peut, au vu des éléments du dossier et par décision motivée, décider que la mainlevée prend effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures, afin qu’un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi en application du II de l’article L. 3211-2-1. Dès l’établissement de ce programme ou à l’issue du délai [de 24 heures], la mesure d’hospitalisation complète prend fin ». La cour d’appel estime donc que « la mention de l’ordonnance relative à l’établissement d’un programme de soins ne constitue pas une décision juridictionnelle dans la mesure où le magistrat n’a aucunement ordonné l’établissement du programme de soins, ce qu’il ne pouvait d’ailleurs pas faire dans le cadre de sa saisine. En conséquence, il convient de supprimer cette mention de l’ordonnance ». Il reste désormais au patient à saisir de nouveau le JLD afin de contester directement le programme de soins rédigé en urgence suite, non à une évolution de son état de santé, mais à une mainlevée. Il peut aussi tenter d’engager la responsabilité de l’établissement s’il estime que la privation illégale de liberté lui a causé un préjudice."

Eric Péchillon
Responsable du DIU “Droit et psychiatrie”

mercredi 3 septembre 2014

Note du 16 juillet 2014 relative à la pratique du culte en détention. NOR : JUSK1440001N

Une note de l'administration pénitentiaire qui peut servir de base à une problématique que l'on rencontre également dans les établissements de santé mentale avec la rédaction des règlements intérieurs (Contrôle de la légalité d’un règlement intérieur interdisant la sexualité »,  CAA Bordeaux, 6 novembre 2012, M. Claude X contre CHS de Cadillac, req. n°11BX01790, ).

Note du 16 juillet 2014 relative à la pratique du culte en détention. NOR : JUSK1440001N

Comment trouver un équilibre entre le principe de laïcité, de neutralité du service public et respect des libertés individuelles dans les lieux privatifs de liberté.

Cette note fait suite à la demande de pouvoir bénéficier des repas confessionnels en détention (" Télévision et repas confessionnel : le principe d’égalité devant le service public en question », note sous TA de Grenoble, 17 octobre 2013, M.K., req. 1302502, AJPénal, 2014, n°2, p. 95 et Conseil d'Etat, 16 juillet 2014, n°377145)
et aux demandes de certains groupes religieux de pouvoir proposer des aumôniers (« Le culte en détention : une obligation de moyens à la charge de l’administration pénitentiaire », note sous CE, 16 octobre 2013, Garde des Sceaux, ministre de la Justice contre M. N et autres, n° 351115, 351116, 351152, 351153, 351220, 354484, 354485, 354507, 354508, AJPénal 2013, p.685) :

Extraits p 8 et suivantes de la note :
"« 5 - L’accès aux nourritures confessionnelles
a - La distribution de repas
L’article 9 du décret n° 2013-368 du 30 avril 2013 relatif aux règlements intérieurs types des établissements Pénitentiaires dispose que « les détenus doivent recevoir une alimentation variée, bien préparée et présentée, répondant tant en ce qui concerne la qualité et la quantité aux règles de la diététique et de l'hygiène, compte tenu de leur âge, de leur état de santé, de la nature de leur travail et, dans toute la mesure du possible, de leurs convictions philosophiques ou religieuses». Lors des « entretiens arrivants», il est demandé aux personnes détenues de choisir parmi les trois types de menus proposés : classique, sans viande et sans porc.
Un changement de régime alimentaire en cours de détention est toujours possible.

A l’occasion de temps forts du calendrier religieux impliquant le respect de certains rites, des aménagements dans les modalités de distribution des repas peuvent être nécessaires. Des notes de la direction de l’administration pénitentiaire, élaborées en lien avec l’aumônier national concerné, précisent les mesures qu’il convient de prendre.
L’administration pénitentiaire ne propose pas de menus confessionnels. Toutefois, les personnes détenues ont la possibilité d’acheter des produits confessionnels ou d’en recevoir à l’occasion des principales fêtes religieuses.

b - Les cantines
Le dispositif des cantines permet aux détenus d’améliorer l’ordinaire en achetant divers produits, notamment des aliments destinés à compléter les repas proposés gratuitement par l’administration pénitentiaire. Les personnes détenues peuvent, si elles le souhaitent, avoir accès à des nourritures confessionnelles par l’achat de ces produits en cantine.
Chaque établissement pénitentiaire, qu’il soit en gestion publique ou en gestion déléguée, est tenu d’organiser cette offre de produits confessionnels. Au besoin, les établissements se rapprochent de la direction interrégionale et de l’aumônier compétent pour obtenir les coordonnées de fournisseurs et déterminer quels produits intégrer dans le catalogue des cantines.
En cas d’absence de stock, l’établissement accomplit toutes les diligences utiles dès qu’une personne détenue déclare son intention de s’alimenter selon les préceptes de sa religion.

c - Les colis rituels
La remise de colis rituels par les aumôniers agréés est ponctuellement autorisée par notes de la direction de l’administration pénitentiaire lors de fêtes religieuses.
Par ailleurs, les aumôniers sont autorisés à apporter des nourritures confessionnelles aux arrivants lorsque la cantine de l’établissement n’en propose pas, le temps que les démarches nécessaires à l’approvisionnement soient accomplies. Cette dérogation au principe d’interdiction des colis alimentaires est limitée dans le temps ; elle cesse dès lors que des produits confessionnels sont proposés dans le cadre des cantines.

II - LA LUTTE CONTRE LE PROSÉLYTISME, LES DÉRIVES RADICALES ET SECTAIRES
La protection de la liberté de conscience, de pensée et de religion des personnes détenues (A) implique que l’administration pénitentiaire lutte contre le prosélytisme et les dérives radicales et sectaires (B)

A - La recherche du consentement libre et éclairé des personnes détenues
Le consentement libre et éclairé des personnes détenues est recherché dès lors qu’il leur est proposé de participer à des activités à caractère cultuel.
En effet, la liberté religieuse comprend en creux celle de ne pas en avoir ou d’en changer.
Dans cette logique :
      les intervenants cultuels et les activités religieuses sont clairement identifiés comme tels ;
-          les sollicitations à caractère religieux sont strictement encadrées :
1 - L’absence de contrainte
Dans le prolongement de l’article 31 de la loi de 1905, qui sanctionne le prosélytisme, la règle pénitentiaire européenne 29.3 prévoit que « les détenus ne peuvent être contraints de pratiquer une religion ou de suivre une philosophie, de participer à des services ou réunions religieux, de participer à des pratiques religieuses ou bien d’accepter la visite d’un représentant d’une religion ou d’une philosophie quelconque ».

2 - L’identification des intervenants cultuels et des activités religieuses
La personne détenue peut exercer son libre arbitre seulement si elle possède une information claire. Ainsi, les personnes détenues sont systématiquement informées lorsque des activités ont un caractère religieux ou sont organisées en lien avec l’aumônerie. Elles sont également informées lorsque des aumôniers participent à des événements socioculturels organisés en détention.
De manière générale, les activités de l’aumônerie sont clairement identifiées et distinguées de celles des autres intervenants, notamment associatifs. Pour éviter toute confusion, un aumônier ne peut intervenir en détention ou auprès des familles des personnes détenues en qualité de membre d’une association. La fonction d’aumônier est notamment incompatible avec le statut de visiteur de prison.
En cas de conflit entre différentes fonctions, il appartient au chef d’établissement de demander à l’intéressé d’opérer un choix entre ces fonctions dans un délai raisonnable.

B - L’encadrement des sollicitations à caractère religieux
La pratique du culte est donc une démarche volontaire, qui doit être initiée par la personne détenue sans qu’elle ait été influencée en ce sens par des visites ou des courriers, par la remise et l’envoi de publications ou par tout autre moyen.

1 - La rencontre avec les aumôniers
Dans la mesure où la pratique du culte est une simple faculté pour les personnes détenues, les aumôniers ne sont pas autorisés à aller à leur rencontre sans avoir été sollicités au préalable.
Cette dernière disposition n’interdit pas aux aumôniers agréés au sein d’un établissement d’organiser une réunion d’information collective à destination des arrivants, dans les conditions définies au paragraphe I.B.1.

2 - La remise d’objets ou d’ouvrages à caractère religieux
Si la remise et l’envoi d’objets ou de publications à caractère religieux est possible dans les conditions décrites ci-dessus (paragraphe I.B.4.), il faut cependant que la personne détenue en ait fait la demande expresse au préalable. Les distributions collectives d’objets ou de publications ne peuvent avoir lieu qu’à l’occasion d’activités organisées en lien avec les aumôneries.
Pour éviter tout prosélytisme, il convient également de distinguer nettement les colis rituels des colis remis à l’occasion des fêtes de fin d’année :
-          s’agissant des colis de fin d’année:
le nom de l’association peut apparaître mais les colis ne contiennent aucun objet ni aucune publication à caractère religieux
-          s’agissant des colis rituels remis à l’occasion de fêtes religieuses : les colis, qui sont composés sous la responsabilité des aumôniers, peuvent contenir des objets ou des publications à caractère religieux. Des associations peuvent contribuer, par des dons financiers ou en nature, à la composition de ces colis mais le nom de l’association ne doit pas apparaître. Toute autre modalité d'organisation fait l'objet d'une note particulière.

Ces colis sont soumis aux contrôles de sécurité nécessaires à la prévention des évasions et au maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements pénitentiaires.

3 - Les demandes d’intervention
Il arrive que des associations à caractère religieux se manifestent pour intervenir en détention.
Si les statuts de l’association font clairement apparaître une vocation religieuse, l’établissement invite l’association à prendre contact avec l’aumônerie puisque seuls les aumôniers et intervenants d’aumônerie sont habilités à organiser des activités religieuses.
S’il existe un doute sur le caractère potentiellement sectaire de l’association, l’établissement en informe le référent chargé de la laïcité et de la pratique du culte au sein de la direction interrégionale des services pénitentiaires.
Si l’association n’affiche pas d’objet religieux mais que l’établissement a un doute sur la motivation réelle de la demande, il saisit également le référent au niveau interrégional.
Dans les deux cas, le référent chargé de la laïcité et de la pratique du culte peut prendre l’attache de la direction de l’administration pénitentiaire qui décide alors des suites à donner à cette demande d’intervention.

4 - Les courriers d’association ou groupement à caractère religieux
Les personnes détenues sont autorisées à correspondre avec toute association, dans la limite posée par l’article 40 de loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, qui dispose que « le courrier adressé ou reçu par les personnes détenues peut être contrôlé et retenu par l'administration pénitentiaire lorsque cette correspondance paraît compromettre gravement leur réinsertion ou le maintien du bon ordre et la sécurité ».
En revanche, lorsqu’une association cherche à entrer en contact avec une personne détenue sans avoir été, au préalable, directement sollicitée par cette dernière, l’établissement ne lui communique pas son numéro d’écrou.
De manière générale, lorsqu’une association à caractère religieux obtient le numéro d'écrou d’une personne détenue et lui adresse un courrier, il convient :
      de ne pas retenir la correspondance (sauf si celle-ci entre dans le champ de l'article 40 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009) ;
-          de remettre le courrier à la personne détenue en main propre tout en lui indiquant clairement que l’association est une association à caractère religieux afin d’éviter toute dérive prosélyte.

C - Les restrictions apportées aux pratiques cultuelles

1. Les regroupements à caractère cultuel
Les prières collectives et regroupements à caractère religieux ne sont autorisés qu’en salle polycultuelle, en présence des intervenants d’aumônerie

2 - Le port de signes religieux
Le port de signes par lesquels les personnes détenues manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit
Ainsi, certains objets ou vêtements ne sont autorisés que dans des lieux limitativement identifiés. C’est le cas des voiles et des vêtements de prière qui ne sont autorisés qu’en cellule et en salle polycultuelle : lors des trajets de la cellule à la salle de culte, ceux-ci sont transportés dans un sac. Pour des raisons de sécurité, cette règle s’applique également à la djellaba même s’il s’agit d’un vêtement coutumier plutôt que d’un vêtement cultuel : celle-ci ne peut être revêtue qu’en cellule ou en salle de culte ; elle est transportée dans un sac lors des trajets de la cellule à la salle de culte.
En revanche, les impératifs de sécurité s’opposent à ce que des tapis de prière soient transportés à l’intérieur de la détention. Ainsi, les personnes détenues sont autorisées à conserver un tapis de prière en cellule et des tapis de prière peuvent être entreposés dans la salle de culte.