mercredi 14 mai 2008

sujet droit administratif mai 2008

Sujets droit administratif licence 2ème année
mai 2008


dissertation: intérêt général et juge administratif

Commentaire d'arrêt: cour administrative d'appel de Bordeaux 10 juillet 2007 req. n° 05BX01097

Cour Administrative d'Appel de Bordeaux
N° 05BX01097 3ème chambre (formation à 3)
lecture du mardi 10 juillet 2007
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la requête, enregistrée le 3 juin 2005au greffe de la cour sous le n° 05BX01097, présentée pour M. Jacques D., demeurant ..., par Me Pielberg ;
Il demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 22 juillet 2004 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 280 704,38 euros en réparation du préjudice qu'il a subi à raison de l'émeute intervenue les 12 et 13 novembre 1987 à la maison centrale de Saint-Maur où il était concessionnaire d'un contrat de main-d'oeuvre pénale ;
- de condamner l'Etat à lui verser ladite indemnité ;
………………………………………………………………………………………….
Vu l'ensemble des pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement convoquées à l'audience ;
Considérant que M. D., qui était concessionnaire de main-d'oeuvre pénale à la maison centrale de Saint-Maur en vertu d'une convention conclue avec l'administration pénitentiaire le 26 juin 1986, fait appel du jugement en date du 22 juillet 2004 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des pertes en matériel, pièces fabriquées et matières premières et des pertes d'exploitation qu'il a subies par suite de la mutinerie des détenus ayant eu lieu les 12 et 13 novembre 1987 et au cours de laquelle des ateliers de travail ont été incendiés ;
Sur la fin de non-recevoir de la requête opposée par le ministre de la justice :
Considérant que M. D. a présenté le 23 septembre 2004 une demande d'aide juridictionnelle en vue de faire appel du jugement attaqué qui lui a été notifié le 10 août 2004 ; que cette demande, intervenue avant l'expiration du délai d'appel de deux mois à l'encontre de ce jugement, a eu pour effet de proroger ledit délai jusqu'à la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle, intervenue le 12 avril 2005 soit moins de deux mois avant l'enregistrement de la requête au greffe de la cour ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la justice et tirée de la tardiveté de la requête doit être écartée ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. D. a saisi le 22 janvier 2002 le ministre de la justice, soit avant que ce dernier n'oppose en première instance la fin de non-recevoir tirée du défaut de liaison du contentieux, d'une demande indemnitaire préalable ayant fait l'objet, à l'expiration d'un délai de deux mois, d'une décision implicite de rejet à l'encontre de laquelle l'intéressé a précisé diriger ses conclusions ; qu'en conséquence, ladite fin de non-recevoir ne peut être accueillie ;
Sur le fond :
Considérant que si l'administration s'est prévalu, par un mémoire enregistré le 7 mars 2002 au tribunal administratif de Limoges, de la prescription quadriennale de la créance de M. D., elle n'a pas justifié d'une délégation donnant compétence au signataire de ce mémoire pour opposer l'exception de prescription quadriennale ; que, par suite, celle-ci ne peut en tout état de cause être retenue ;
Considérant qu'aux termes de l'article 92 de la loi du 7 janvier 1983, devenu l'article L 2216-3 du code général des collectivités territoriales : « L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens » ;
Considérant que , contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, la qualité de cocontractant de l'administration de M. D. à l'époque des faits litigieux ne fait pas obstacle à la recevabilité de son action tendant à l'engagement de la responsabilité sans faute de l'Etat sur le fondement des dispositions précitées de l'article L 2216-3 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté comme étant irrecevable sa demande tendant à la condamnation de l'Etat sur ce seul fondement ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. D. devant le tribunal administratif de Limoges ;
Considérant que les dispositions précitées de l'article L 2216-3 du code général des collectivités territoriales ne distinguent pas entre les causes de la formation de l’attroupement ou du rassemblement et n'énoncent par ailleurs aucune restriction quant à la nature des dommages indemnisables ; qu'il résulte de l'instruction que l'émeute des détenus au sein de la maison centrale de Saint-Maur les 12 et 13 novembre 1987 a revêtu le caractère d'un mouvement général, spontané et violent au cours duquel ont notamment été incendiés les ateliers de travail ; que les pertes en matériel et d'exploitation résultant pour M. D. de l'incendie de l'atelier dans lequel il exerçait son activité revêtent ainsi le caractère de dommages résultant de crimes ou délits commis à force ouverte ou par violence par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés ; que, par suite, la responsabilité sans faute de l'Etat se trouve engagée à raison de ces dommages ;
Considérant que les seules pièces produites par M. D. ne permettent pas d'établir que les pertes en matériel, pièces fabriquées et matières premières et les pertes d'exploitation qu'il a subies à la suite de l'incendie de son atelier de travail seraient supérieures au montant de 168 000 F retenu par le rapport de l'expert désigné par l'administration pénitentiaire en 1987 ainsi que par le ministre de la justice lui ayant proposé une indemnité le 15 février 1990 ; que, par suite, l'indemnité mise à la charge de l'Etat doit être fixée à 25 611,43 euros ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le jugement attaqué doit être annulé et que l'Etat doit être condamné à verser une indemnité de 25 611,43 euros à M. D. ;
DECIDE : Article 1er : Le jugement du TA de Limoges en date du 22 juillet 2004 est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. X une indemnité d'un montant de 25 611,43 euros.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par M. D. devant le TA de Limoges est rejeté.




Sujet mai 2007
Année 2006-2007
Licence 2ème année (semestre 4)
Première session



Sujet n° 1 Dissertation
:
La police administrative peut-elle être considérée
comme un service public ordinaire ?

Sujet n° 2 Commentaire d’arrêt
CE 6 novembre 2002, Molinier req. n° 234271
Conseil d'Etat statuant au contentieux
N° 234271
8 / 3 SSR
M. Sauron, Rapporteur
M. Bachelier, Commissaire du gouvernement
M. Robineau, Président

Lecture du 6 novembre 2002

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Gilbert Molinier, ; M. Molinier demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir les dispositions réglementaires de la circulaire n° 2001-53 du 28 mars 2001, publiée le 5 avril 2001 au Bulletin officiel de l'éducation nationale, intitulée "Code de bonne conduite des interventions des entreprises en milieu scolaire" ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'éducation ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Sauron, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. Molinier conteste la légalité de la circulaire du 5 avril 2001 du ministre de l'éducation nationale intitulée "code de bonne conduite des interventions des entreprises en milieu scolaire" en tant qu'elle comporte les paragraphes II-3 relatif aux encarts publicitaires dans les plaquettes de présentation des établissements de l'enseignement secondaire, II-4 relatif à l'interdiction de la publicité sur les distributeurs automatiques de boissons ou d'alimentation, III-2-2 relatif à l'utilisation de documents pédagogiques élaborés par une entreprise et III-5 relatif au partenariat pour l'usage de produits multimédias ;
Considérant que, hors le cas des bulletins officiels des ministères, les administrations peuvent insérer, dans leurs publications, des messages publicitaires, lorsque cette insertion peut être regardée comme répondant à un intérêt public ou comme le complément ou le prolongement de l'activité de service public que constitue l'information des fonctionnaires et des administrés, sous réserve que le message publicitaire soit en rapport avec la publication en cause ; que, par suite, en indiquant, dans le passage du paragraphe II-3, critiqué par M. Molinier, que pouvaient être admises, dans les diverses brochures de présentation élaborées par les établissements de l'enseignement secondaire, des publicités relatives à des activités parascolaires ou, s'agissant des établissements de l'enseignement professionnel, des encarts relatifs aux entreprises qui accueillent en stage les élèves et en précisant que les messages doivent alors "mettre l'accent sur le rôle que joue l'entreprise dans la formation des élèves", le ministre s'est borné à rappeler la règle de droit applicable à ce type de document ;
Considérant que le passage contesté du paragraphe II-4 de la circulaire, qui énonce que les appareils de distribution automatique de boissons ou d'aliments installés dans les établissements scolaires ne doivent pas servir, en eux-mêmes, de supports publicitaires, tout en relevant que la marque des produits proposés dans ces appareils peut être visible, se borne à adresser des recommandations permettant d'assurer le respect du droit en tenant compte des caractéristiques propres à ces appareils ;
Considérant qu'en demandant aux enseignants, dans le paragraphe III-2-2 de sa circulaire, de veiller à la qualité pédagogique des documents qu'une entreprise peut, dans le cadre d'"actions de partenariat", être amenée à remettre aux élèves tout en admettant que l'entreprise puisse, dans ce cas, faire apparaître discrètement sa marque sur ces documents, le ministre de l'éducation n'a pas davantage ajouté à l'état du droit ;
Considérant, enfin, d'une part, que les termes du paragraphe III-5 de la circulaire attaquée, selon lesquels "la consultation de sites internet privés ou l'utilisation de cédéroms qui comportent des messages publicitaires ne saurait être regardée comme une atteinte au principe de neutralité", n'ont d'autre portée que de constater que cette consultation ne relève pas de règles différentes de celles qui régissent la consultation, en classe, de publications de la presse écrite pouvant comporter des publicités ; que, d'autre part, les autres dispositions du même paragraphe contiennent seulement des recommandations, tendant à ce que, lors de l'utilisation de produits multimédias, "en ligne" ou "hors ligne", par les établissements scolaires, le temps d'affichage des publicités éventuellement présentées soit limité et que les messages publicitaires aient un lien avec l'objet pédagogique du site ou avec une activité culturelle ou un événement lié au monde éducatif ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'intérêt à agir de M. Molinier, que les passages contestés par celui-ci de la circulaire du 5 avril 2001 ne contiennent, par eux-mêmes, aucune disposition réglementaire susceptible d'être discutée par la voie du recours pour excès de pouvoir ; que sa requête n'est, par suite, pas recevable ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. Molinier est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Gilbert Molinier et au ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.