mardi 22 juillet 2014

le Conseil d'Etat ordonne la suspension de l'injonction de distribuer des repas halal



 Comme nous l'avions souligné dans notre commentaire paru à l'AJPénal 2014 ( note sous TA de Grenoble, 17 octobre 2013, M.K., req. 1302502, AJPénal, 2014, n°2, p. 95.) , le Conseil d'Etat décide de suspendre l'injonction faite au centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier de servir des repas "halal" aux détenus qui en feraient la demande.

Cette décision permet en effet de discuter au fond de la question de l'égalité devant le service public et des obligations pesant sur l'administration pénitentiaire (qui fournit des repas sans porc mais pas de rapas halal).

Rappelons que cette affaire portait également sur le tarif des télévisions dans les prisons (différence de tarif entre les prisons gérées par l'Etat et celles gérées par le privé).

en copie la dépeche du jurisclasseur du mardi 22 juillet 2014

"Suspension provisoire d’un jugement ordonnant la distribution de repas « halal » dans un centre pénitentiaire
Par un arrêt rendu le 16 juillet 2014, le Conseil d'Etat a décidé de suspendre provisoirement l'exécution d'un jugement du tribunal de grande instance de Grenoble qui enjoignait le directeur du centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier de proposer régulièrement aux détenus de confession musulmane des menus composés de viandes « halal ».
En l'espèce, un premier jugement du tribunal administratif de Grenoble avait enjoint le directeur du centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier de proposer régulièrement aux détenus de confession musulmane des menus composés de viandes « halal ». Le ministre de la Justice, qui a fait appel de ce jugement devant la cour administrative d'appel de Lyon, avait demandé à cette cour, puis au Conseil d'État de suspendra l'exécution du jugement pendant l'examen de son appel.
Au regard de l' article R. 811-17 du Code de justice administrative , le sursis à exécution d'un jugement peut en effet être ordonné à la demande du requérant lorsque l'exécution du jugement est susceptible d'entraîner des conséquences difficilement réparables et que le requérant fait état d'arguments sérieux pour contester ce jugement. Lorsque le sursis est accordé, le jugement n'est pas exécuté tant que le recours dirigé contre ce jugement n'a pas été examiné.
Le Conseil d'État a fait droit à la demande de sursis à exécution du ministre de la Justice. La Haute juridiction a, d'une part, relevé que la distribution de repas composés de viande « halal » au sein du centre pénitentiaire représenterait un coût élevé et entrainerait des évolutions majeures dans le fonctionnement du centre pénitentiaire qui ne pourraient, en cas d'annulation du jugement du tribunal administratif de Grenoble, qu'être très difficilement remises en cause. Il en a déduit que l'exécution du jugement aurait des conséquences difficilement réversibles.
Le Conseil d'État a, d'autre part, estimé que les arguments invoqués par le garde des Sceaux pour contester le jugement, tirés de l'atteinte au principe de laïcité et de l'incompatibilité de la mesure ordonnée par le tribunal administratif avec les exigences de la détention apparaissent, en l'état de l'instruction, comme sérieux.
En conséquence, l'obligation pour l'administration d'exécuter l'injonction de proposer des menus composés de viande « halal » se trouve suspendue.
JCl. Procédure pénale, synthèse 110
Sources : CE, 16 juill. 2014, n° 377145, Garde des Sceaux, Min. Justice c/. M. B.