mercredi 25 décembre 2013

Rapport Décembre 2013 : la santé mentale et l’avenir de la psychiatrie


 Le rapport
http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i1662.asp

Rendre exceptionnelles les mesures limitatives et restrictives de liberté: vers un changement de culture?


Liste des 30 propositions:
UNE MEILLEURE PRISE EN CHARGE
Diminuer le délai de diagnostic des maladies mentales et de premier accès aux soins.
Proposition n° 1 (page 60) : former les médecins généralistes afin qu’ils puissent détecter les troubles psychiatriques et orienter au mieux les patients en :
– incluant un stage obligatoire en psychiatrie, en secteur hospitalier et en ambulatoire dans la formation initiale ;
– renforçant la formation continue dans le domaine de la psychiatrie.
Proposition n° 2 (page 61) : développer la collaboration entre généralistes et psychiatres en :
– encourageant les consultations de psychiatres dans les maisons de santé afin de favoriser la coordination entre le médecin généraliste et le psychiatre ;
– favorisant les échanges entre le médecin généraliste et le psychiatre pour assurer un suivi optimal du patient ;
– encourageant des échanges et collaborations dans le cadre du secteur.
Proposition n° 3 (page 62) : améliorer l’accessibilité au centre médico-psychologique (CMP) en :
– fixant dans les schémas régionaux d’organisation des soins élaborés par les agences régionales de santé un objectif de délai maximal pour obtenir un premier rendez-vous ;
– organisant un système de pré-entretien avec le concours d’infirmiers ou de psychologues afin de permettre une évaluation du patient et une orientation vers une prise en charge ultérieure ;
– augmentant l’amplitude horaire et les jours d’ouverture des centres médico-psychologiques.
Proposition n° 4 (page 66) : développer les liens entre secteurs et professionnels de santé (protection maternelle et infantile, médecine du travail, service universitaire de médecine préventive et de promotion de la santé, institution d’aide sociale et de travail social), afin de repérer les personnes paraissant présenter des troubles mentaux et, le cas échéant, coordonner les actions à leur bénéfice.
Prévoir une assistance téléphonique auprès d’un service psychiatrique à destination de ces professionnels.
Améliorer la prise en charge des maladies somatiques.
Proposition n° 5 (page 63) : organiser la prise en charge des maladies somatiques en :
– inscrivant cet objectif dans le cadre du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens des établissements ;
– prévoyant selon la taille de l’hôpital un service, un poste ou des vacations de somaticiens dans les unités d’hospitalisation en psychiatrie ;
– élaborant des conventions entre les hôpitaux psychiatriques et les hôpitaux généraux ou des maisons de santé.
UN SECTEUR RÉNOVÉ
Proposition n° 6 (page 49) : réaffirmer la légitimité et l’actualité des secteurs en fixant par la loi leurs missions communes.
Proposition n° 7 (page 51) : favoriser, dans les schémas régionaux d’organisation des soins élaborés par les agences régionales de santé, l’articulation entre l’offre de soins psychiatriques publique et privée.
Proposition n° 8 (page 63) : établir des passerelles entre les secteurs et les établissements médico-sociaux.
Proposition n° 9 (page 58) : inciter à la signature de conventions entre les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et les établissements de santé mentale afin de prévoir des consultations de psychiatres en EHPAD et l’admission en hôpital en cas de crise.
Conforter les politiques intersectorielles.
Les populations précaires
Proposition n° 10 (page 55) : généraliser sur une base territoriale définie par l’agence régionale de santé le dispositif des équipes mobiles psychiatrie-précarité (EMPP).
Proposition n° 11 (page 75) : soutenir la démarche « Un chez-soi d’abord ». Mettre à disposition des logements adaptés en développant la pratique des baux glissants ou l’intermédiation locative afin de favoriser l’accueil des malades dans des logements indépendants.
Proposition n° 12 (page 76) : développer l’insertion professionnelle en prenant appui dans la mesure du possible sur le conseil local de santé mentale.
Proposition n° 13 (page 49) : réaffirmer la légitimité et l’actualité de l’intersecteur infanto-juvénile en fixant par la loi leurs missions minimales.
UNE INCLUSION SOCIALE FAVORISÉE
Développer la démocratie sanitaire.

Rendre exceptionnelles les pratiques restrictives de liberté.

Proposition n° 14 (page 68) : s’assurer au niveau du ministère de la santé, des agences régionales de santé, des établissements de santé mentale et de la Haute Autorité de santé que les restrictions aux libertés individuelles de patients faisant l’objet de soins psychiatriques sous contrainte sont adaptées, nécessaires et proportionnées à leur état mental et à la mise en œuvre du traitement requis.
Proposition n° 15 (page 68) : considérer qu’isolement thérapeutique et contention sont des solutions de dernier recours qui relèvent d’une prescription médicale individuelle prise pour une durée limitée dont la mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte.
Constituer un registre administratif dans chaque établissement d’hospitalisation psychiatrique, consultable notamment par la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP) et le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, recensant les mesures d’isolement ou de contention prises et précisant l’identité des patients, le médecin prescripteur, les dates et heures de début et fin des mesures, le nom et la qualification du personnel ayant surveillé leur mise en œuvre.
Proposition n° 16 (page 73) : prendre les dispositions nécessaires au bon fonctionnement des commissions départementales des soins psychiatriques, veiller au recueil et à l’exploitation de leurs rapports.
Développer les conseils locaux de santé mentale.
Proposition n° 17 (page 53) : encourager la constitution de conseils locaux de santé mentale ou de santé et de santé mentale. Élaborer à cette fin un référentiel national qui servirait de guide tout en gardant la souplesse nécessaire à l’adaptation au territoire.
Proposition n° 18 (page 53) : étendre le périmètre des activités des conseils locaux de santé mentale à la pédopsychiatrie et à la psychiatrie du sujet âgé.
Encourager la participation des usagers et des familles.
Proposition° 19 (page 70) : renforcer la participation des usagers et des familles en :
– incitant au développement des maisons des usagers au sein des établissements de santé mentale ;
– encourageant la constitution de groupes d’entraide mutuelle.
Proposition n° 20 (page 71) : veiller à la représentation effective des usagers et de leur famille dans toutes les instances où elle est prévue.
Améliorer la prise en charge des troubles psychiatriques en milieu pénitentiaire.
Proposition n° 21 (page 78) : évaluer l’application de l’article 122-1 du code pénal au regard du nombre important de détenus atteints de maladie mentale grave.
Proposition n° 22 (page 81) : renforcer le temps d’intervention et le nombre de professionnels de santé mentale intervenant auprès des détenus.
Proposition n° 23 (page 83) : assurer un meilleur suivi de la sortie des détenus présentant des troubles psychiatriques en formalisant la coordination entre les services pénitentiaires de probation et d’insertion (SPIP) et les psychiatres pour préparer leur sortie, par le biais de conventions entre les ministères de la santé et de la justice.
Proposition n° 24 (page 82) : sensibiliser le personnel pénitentiaire aux pathologies psychiatriques dans le cadre de leur formation initiale et continue à l’École nationale de l’administration pénitentiaire (ENAP), en lien avec le ministère de la santé.
DES MOYENS ADAPTÉS
Proposition n° 25 (page 85) : réarticuler les compétences professionnelles en :
– reconnaissant un rôle aux psychologues cliniciens en premier recours et en examinant la possibilité et les modalités d’une prise en charge de leur exercice par l’assurance maladie ;
– reconnaissant le rôle des infirmiers ;
– affirmant le lien avec les généralistes intervenant dans le service psychiatrique comme hors du service.
Améliorer la formation des infirmiers.
Proposition n° 26 (page 87) : proposer une orientation spécifique aux étudiants infirmiers souhaitant travailler principalement dans des établissements de santé mentale en reconnaissant une spécialisation en psychiatrie lors de leur formation à leur diplôme et pour ceux en poste depuis 1993 en recourant à la valorisation des acquis de l’expérience.
Développer la recherche.
Proposition n° 27 (page 87) : donner à la recherche sur les maladies mentales des moyens financiers à hauteur de leur taux de prévalence.
Proposition n° 28 (page 88) : sensibiliser les internes en psychiatrie à la recherche en :
– incluant un stage d’initiation à la recherche dans le cadre de la formation ;
– renforçant le nombre de postes d’« enseignants hospitalo-universitaires ».
Proposition n° 29 (page 88) : encourager la pluridisciplinarité et l’interdisciplinarité de la recherche en mobilisant aussi bien les sciences humaines que les neurosciences, la recherche fondamentale et celle exploitant les données de la clinique.
Proposition n° 30 (page 89) : reconnaître la recherche menée par des praticiens hors du cadre universitaire et définir les modalités de son évaluation.

Plan du rapport
INTRODUCTION 7
I. UN DISPOSITIF DES SOINS PSYCHIATRIQUES NOVATEUR AU BILAN DÉCEVANT 17
A. UNE PRÉOCCUPATION RÉCURRENTE DES POUVOIRS PUBLICS : L’AVENIR DE LA PSYCHIATRIE 17
1. Des plans successifs 17
2. Des constats récurrents 20
B. UN PILOTAGE MULTIPLE : UN FOISONNEMENT D’ACTEURS 22
1. Le ministère de la santé 22
a. La direction générale de la santé 22
b. La direction générale de l’offre de soins 22
2. Les agences régionales de santé 23
C. UN DISPOSITIF NOVATEUR : LA PRISE EN CHARGE ORGANISÉE AUTOUR DU « SECTEUR » 24
1. Une organisation originale 25
a. Un concept novateur 25
b. Un concept fragilisé 26
2. Une diversité des modalités de prise en charge 26
a. Les hospitalisations complètes 27
b. Les alternatives à l’hospitalisation 28
c. Les soins ambulatoires 29
d. Les urgences 29
3. Les particularités de la pédopsychiatrie 29
D. UN BILAN DÉCEVANT : DES DYSFONCTIONNEMENTS ET UNE INSUFFISANCE DE MOYENS 32
1. Des dysfonctionnements dans la prise en charge en amont et en aval 32
a. Des populations oubliées 33
b. Un accès difficile à une première consultation 34
c. Un cloisonnement entre le somatique et la psychiatrie 34
d. Un recours problématique à la pratique de la contention et à l’isolement thérapeutique 35
e. Un cloisonnement entre le sanitaire et le médico-social 37
f. Des inégalités territoriales dans l’offre de soins persistantes 38
2. Des moyens inégalement répartis 40
a. Un financement fondé sur une dotation 40
b. Des moyens humains limités 41
3. Un effort de recherche contrasté 45
II. VERS UN DISPOSITIF DES SOINS PSYCHIATRIQUES RÉNOVÉ ET INTÉGRÉ 49
A. UN SECTEUR RÉNOVÉ 49
1. Un ancrage territorial réaffirmé 49
2. Une ouverture aux autres acteurs 50
a. La complémentarité avec l’offre privée 50
b. La solution des conseils locaux de santé mentale 51
3. Une intersectorialité confortée 54
B. UNE PRISE EN CHARGE INTÉGRÉE 58
1. Faciliter le premier accès aux soins 59
a. Le rôle clé des médecins généralistes 59
b. Une plus grande accessibilité aux centres médico-psychologiques 61
c. La prise en charge des maladies somatiques 62
2. Améliorer l’articulation avec le médico-social 63
a. Un renforcement de l’offre 63
b. Une coordination accrue entre tous les acteurs 65
3. Favoriser l’inclusion sociale 66
a. Renforcer les outils de démocratie sanitaire 66
b. Développer une offre de logements adaptés 73
c. Parvenir à l’insertion professionnelle 75
4. Améliorer la prise en charge des détenus atteints de troubles psychiatriques 76
C. DES MOYENS ADAPTÉS 83
1. Un nouveau modèle de financement 83
2. Une véritable politique de ressources humaines 84
a. Le partage des tâches 84
b. Une formation améliorée 86
3. De nouvelles orientations pour la recherche 87

Audition du 28 mars 2013 assemblée nationale

jeudi 19 décembre 2013

30 propositions pour réformer le dispositif des soins psychiatriques

Communiqué de l'Assemblée nationale
"Après avoir entendu 118 personnes au cours de 77 heures d’auditions et plusieurs déplacements sur le terrain, la mission conclut que le dispositif des soins psychiatriques, novateur à son origine, doit être réformé et présente à cet effet 30 propositions. L’organisation en « secteur » doit être revue et ses missions définies par la loi. Une meilleure prise en charge des malades nécessite de diminuer le délai de diagnostic et de faciliter le premier accès aux soins. La mission suggère aussi de mieux former les médecins généralistes aux maladies mentales, de développer leur collaboration avec les psychiatres et d’améliorer l’accessibilité aux centres médico-psychologiques. Enfin, l’évolution du statut de l’usager, de malade à citoyen, doit passer par un renforcement de la démocratie sanitaire qui suppose une amélioration des droits individuels des malades et une plus grande participation des usagers et des familles."
A noter (source hospimédia):
- une rénovation du secteur, 
*"réaffirmer la légitimité et l’actualité des secteurs en fixant par la loi leurs missions communes".
* favoriser, dans les Schémas régionaux d’organisation des soins (SROS) , l'articulation entre l'offre de soins psychiatriques publique et privée.
* établir des passerelles entre les secteurs et les établissements médico-sociaux
* inciter à la signature de conventions entre les Ehpad et les établissements de santé mentale afin de prévoir des consultations de psychiatres en Ehpad et l’admission en hôpital en cas de crise.

-  La formation des médecins et infirmiers afin de mieux détecter les troubles et pathologies mentales afin d'orienter le plus rapidement possible les patients vers les structures adaptées.
- Amélioration de l'accessibilité aux Centres médico-psychologiques (CMP): réduction des délais de rendez vous.
 -  reconnaissance d'un rôle aux psychologues cliniciens en premier recours
- reconnaissance du rôle des infirmiers et l'affirmation du lien avec les généralistes.


- Amélioration de la prise en charge somatique par l'inscription de cet objectif dans le cadre du Contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens des établissements (CPOM)
- encouragement à la signature de conventions entre les hôpitaux psychiatriques et les hôpitaux généraux ou des maisons de santé.
- généralisation "sur une base territoriale définie par l'ARS, le dispositif des Équipes mobiles psychiatrie-précarité (EMPP) et de réaffirmer la légitimité et l’actualité de l'intersecteur infanto-juvénile en fixant par la loi leurs missions minimales.

- Veiller à ce que "les restrictions aux libertés individuelles de patients faisant l'objet de soins psychiatriques sous contrainte sont adaptées, nécessaires et proportionnées à leur état mental et à la mise en œuvre du traitement requis".


A propos de la contrainte:

"isolement thérapeutique et contention sont des solutions de dernier recours qui relèvent d'une prescription médicale individuelle prise pour une durée limitée dont la mise en œuvre doit faire l'objet d’une surveillance stricte".
- Constitution d'un registre administratif dans chaque établissement d’hospitalisation psychiatrique, consultable notamment par la Commission départementale des soins psychiatriques (CDSP) et le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), recensant les mesures d'isolement ou de contention prises.
- Extension du périmètre des activités des Conseils locaux de santé mentale (CLSM) à la pédopsychiatrie et à la psychiatrie du sujet âgé.

-Nécessité d'améliorer la prise en charge des troubles psychiatriques en milieu pénitentiaire.

dimanche 8 décembre 2013

Contrôle de la légalité d'une hospitalisation suite à un péril imminent


CA de Limoges, 6 novembre 2013



Lorsqu’une personne est admise sans consentement en soins psychiatriques dans un établissement  suite à une décision du directeur de l’établissement de santé prise dans le cadre de la procédure de péril imminent prévue à l’article L. 3212-1 du Code de la santé publique, elle dispose de garanties particulières.
Le certificat médical initial doit mentionner que le patient présente des troubles mentaux rendant impossible son consentement aux soins et que son état impose une surveillance constante en milieu hospitalier (les deux critères d’admission classique en SDT), mais également que le patient est en situation de péril imminent (condition supplémentaire justifiant une hospitalisation en l’absence de tiers).
Si à la fin des 72 heures d’observation et de soins, son état de santé le justifie (importance du second certificat médical), le directeur d’établissement peut décider de prolonger l’hospitalisation complète du patient. Le directeur de l’établissement saisit ensuite le juge des libertés et de la détention (JLD) aux fins de contrôle de la mesure d’hospitalisation. Le JLD examinera alors la légalité de l’hospitalisation complète.
Dans cette affaire, le patient demandait alors la mainlevée de la mesure car il souhaite faire l’objet d'un suivi dans le cadre d’une hospitalisation libre. Le JLD devait par conséquent vérifier si les conditions du maintien de la mesure de contrainte étaient encore justifiées (en particulier l’incapacité à consentir).
La cour d’appel confirme la décision du premier juge. Elle considère tout d’abord que la décision initiale d’hospitalisation était bien légale car il existait bien à la date de l’admission un péril imminent pour la santé du patient justifiant le recours à la procédure de péril imminent. A noter que le « péril imminent » s’apprécie au moment de l’admission et qu’il peut parfaitement disparaitre par la suite. La levée de la mesure ne sera possible que si les conditions classique de la SDT ne sont plus remplies.
La cour d’appel juge ensuite qu’une surveillance médicale constante justifie une hospitalisation complète et que la poursuite des soins sous cette forme demeure nécessaire.




Cour d'appel de Limoges
05
Audience publique du mercredi 6 novembre 2013
N° de RG: 13/00043

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours





ENTRE :

1o- Monsieur Jean-Jacques X..., né le 28 février 1966 à Niort (79000), de nationalité française, demeurant ...,, actuellement hospitalisé au centre hospitalier d'Esquirol à Limoges (Haute-Vienne)

Appelant d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Limoges du 22 octobre 2013,

Comparant en personne assisté de Maître Grèze, avocat au barreau de Limoges,

ET :

1o- Monsieur le Procureur Général près la cour d'appel de Limoges, Intimé,Représenté par Maître Odile Valette, Substitut Général,
2o- Monsieur le Directeur du centre hospitalier d'Esquirol, Intimé, Non comparant ni représenté

* *
*
 

Le 10 octobre 2013, Jean-Jacques X... a été admis en soins psychiatriques, sous la forme initiale d'une hospitalisation complète sans consentement au Centre Hospitalier Esquirol de Limoges (87) sur la décision du directeur de l'établissement prise dans le cadre de la procédure de péril imminent prévue au 2o du II de l'article L.3212-1 Code de la santé publique.

L'admission a été effectuée sur la base du certificat médical établi le même jour par le docteur B....

Les deux certificats médicaux prévus aux 2ème et 3ème alinéas de l'article L.3211-2-2 du Code de la santé publique ont été régulièrement établis dans les 24h puis les 72 h de l'admission, les deux médecins n'étant ni l'un ni l'autre auteur du certificat sur la base duquel la décision d'admission a été prise.

Le certificat du 15 octobre 2013 qui conclut au maintien de la mesure a été établi entre le 5ème et le 8ème jour à compter de l'admission du patient en soins psychiatriques.

Le 15 octobre 2013, le directeur de l'établissement a prolongé la mesure de soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète jusqu'au 10 novembre 2013.

Le certificat médical conjoint établi le15 octobre 2013, par deux psychiatres du centre hospitalier, dont l'un ne participe pas à la prise en charge du patient, mentionne la persistance des troubles psychiatriques et la nécessité de poursuivre les soins sous la forme d'une hospitalisation complète.

Par requête en date du15 octobre 2013, le directeur de l'établissement a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Limoges en application de l'article L 3211-12-1 du Code de la santé publique, aux fins de contrôle de la mesure d'hospitalisation.

Par ordonnance du 22 octobre 2013, le juge des libertés et de la détention a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète aux motifs que celle-ci était justifiée au regard de l'état de santé de Jean-Jacques X....

Jean-Jacques X... a interjeté appel de cette décision par l'intermédiaire de son avocat le 28 octobre 2013.

À l'audience, il déclare être sans domicile fixe et que l'adresse figurant dans le dossier de la procédure correspond à une adresse postale à Annemasse (74). Il explique s'être rendu à Limoges pour se faire soigner, en soulignant qu'il reconnaît, d'une part, sa maladie et, d'autre part, la nécessité de suivre des soins psychiatriques. Il demande cependant la mainlevée de la mesure car il souhaite faire l'objet d'un suivi dans le cadre d'une hospitalisation libre.

Il fait grief aux médecins d'avoir considéré qu'il était opposant aux soins alors qu'il a parfaitement conscience de son état et de la nécessité des soins. Il admet par ailleurs se mettre en danger lorsqu'il arrête les soins car il est alors victime d'hallucinations auditives.

Le ministère public requiert la confirmation de la décision du premier juge.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'appel est régulier et recevable pour avoir été formé dans les délais légaux.

Le certificat médical initial, établi le 10 octobre 2013 par le Dr B..., mentionne que Jean-Jacques X... présente des troubles mentaux rendant impossible son consentement aux soins psychiatriques et que son état impose des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier.

Il est par ailleurs mentionné que ce certificat médical a été établi dans le cadre de la procédure dite « de péril imminent ». Il se déduit de cette mention que le médecin a nécessairement considéré qu'il existait, au moment de l'examen, un péril imminent pour la santé de l'intéressé, ce que Jean-Jacques X... a confirmé en indiquant spontanément à l'audience qu'il se trouvait en situation de danger en l'absence de soins et ce, en raison des hallucinations causées par sa maladie.

Il apparaît ainsi qu'il existait bien à la date de l'admission un péril imminent pour la santé du patient, justifiant le recours à la procédure prévue au 2o du II de l'article L.3212-1 Code de la santé publique.

Par ailleurs, il résulte des éléments du dossier que Jean-Jacques X... a fait l'objet d'une hospitalisation en soins psychiatriques en raison d'une décompensation psychotique avec délire de persécutions.

Le certificat médical conjoint établi le 15 octobre 2013 en vue de la saisine du juge des libertés et de la détention mentionne que le patient a été hospitalisé en raison d'une recrudescence des symptômes psychotiques avec un refus des soins. Il est relevé la persistance d'hallucinations auditives et d'idées de persécutions ainsi que l'absence de coopération aux soins.

Jean-Jacques X... conteste qu'un refus des soins lui soit opposé mais il convient de relever que cette opposition aux soins a été constatée par les cinq médecins l'ayant examiné et que, si dans son discours, il déclare reconnaître sa maladie et la nécessité de se soigner, cela ne signifie pas pour autant une adhésion à la forme des soins et au traitement prescrits par les médecins.

Au surplus, il convient de relever que celui-ci qui n'a pas de domicile fixe a indiqué avoir été hospitalisé dans les Pyrénées-Orientales, ce qui vient confirmer la notion de voyage pathologique mentionné dans le certificat médical établi le 13 octobre 2013 et la nécessité de recevoir des soins dans un cadre institutionnel.

Ainsi, il apparaît que les pièces médicales figurant au dossier de la procédure sont concordantes et établissent que Jean-Jacques X... souffre de troubles mentaux qui rendent impossible son consentement, qu'il présente un état mental imposant des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète et que la poursuite des soins sous cette forme demeure nécessaire.

La décision du premier juge sera donc confirmée.

PAR CES MOTIFS

Le Président statuant publiquement, par décision réputé contradictoire et en dernier ressort,

DECLARONS l'appel recevable ;

CONFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Limoges du 22 octobre 2013 ;


lundi 18 novembre 2013

L'hôpital ne peut refuser à un patient de lui communiquer son dossier médical par voie électronique si les informations sont disponibles dans ce format.

Un avis de la commission d'accès aux documents administratifs

Centre hospitalier universitaire de Bordeaux

avis 20131540 - Séance du 25/07/2013
Monsieur X a saisi la commission d’accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 6 mars 2013, à la suite du refus opposé par le directeur du centre hospitalier universitaire de Bordeaux à sa demande de communication de son dossier médical relatif à l’examen ophtalmique qu’il a subi le 25 février 2013, notamment des clichés tirés par tomographie à cohérence optique (OCT) à cette occasion.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, le directeur du centre hospitalier universitaire de Bordeaux a fait valoir que le refus d’adresser au demandeur son dossier par courrier électronique ne valait pas refus de communication, dans la mesure où, au contraire, l’établissement avait assuré celui-ci de son accord à une communication selon d’autres modalités, qu’un désaccord sur ces modalités de communication par voie électronique ne relevait pas du champ d’application de la loi du 17 juillet 1978 mais de celle du 6 janvier 1978, et que les modalités choisies par Monsieur X n’étaient pas permises par la délibération n° 97-008 du 4 février 1997 portant adoption d’une recommandation sur le traitement des données de santé à caractère personnel, adoptée par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
La commission rappelle que le droit à communication des documents administratifs institué par la loi du 17 juillet 1978 ne peut s’exercer que dans la mesure où les dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relatives à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ne sont pas, elles-mêmes, applicables à la demande de communication (Conseil d’État, assemblée, 19 mai 1983, X, n° 40680, p. 208). Or, l’article 39 de la loi du 6 janvier 1978 prévoit, au 4° du I, le droit de toute personne physique d’obtenir du responsable d’un traitement de données à caractère personnel communication, sous une forme accessible, des données à caractère personnel qui la concernent. Ce droit d’accès comprend le droit d’en obtenir copie, et s’applique notamment, ainsi que le rappelle l’article 43 de la même loi, aux données de santé à caractère personnel, dans le respect des dispositions de l’article L. 1111-7 du code de la santé publique.
Il résulte toutefois de l’article 2 de la loi du 6 janvier 1978 que n’entrent dans le champ d’application de celle-ci que les traitements automatisés de données à caractère personnel et les traitements non automatisés de données à caractère personnel contenues ou appelées à figurer dans des fichiers, lesquels sont définis comme « tout ensemble structuré et stable de données à caractère personnel accessibles selon des critères déterminés ».
Or, au cas d’espèce, d’une part, il ne ressort d’aucun des éléments d’informations dont dispose la commission que les documents sollicités par Monsieur X seraient le produit d’un traitement automatisé.
D’autre part, la commission considère que la seule circonstance que ces documents soient rassemblés dans un dossier accessible au moins par le nom de l’intéressé ou par un autre critère de recherche ne suffit pas à permettre de regarder les données à caractère personnel qu’il contient comme étant contenues dans un fichier. En effet, le Conseil d’État a jugé qu’il ne résulte pas de la seule tenue de dossiers individuels que les informations qui y figurent constituent un ensemble structuré et stable de données accessibles selon des critères déterminés, au sens de l’article 2 de la loi du 17 juillet 1978, susceptibles à ce titre d’être regardées comme donnant lieu à un traitement non automatisé de données personnelles contenues ou appelées à figurer dans un fichier, au sens du même article (CE, 26 novembre 2010, M. X et section française de l’Observatoire international des prisons, n° 323694, n° 323930, décision publiée au recueil Lebon).
Aussi la commission estime-t-elle que la demande de Monsieur X ne revêt pas le caractère d’une demande d’accès à des données personnelles le concernant qui relèverait de l’application de la loi du 6 janvier 1978. Cette demande constitue en revanche une demande tendant à l’exercice du droit d’accès à des documents relevant de la protection de sa vie privée et du secret médical et à des informations à caractère médical, concernant sa santé, qui lui est garanti tant par les dispositions du II de l’article 6 de la loi du 17 juillet 1978 que par celles de l’article L. 1111-7 du code de la santé publique, sur l’application desquelles la commission est compétente pour émettre un avis, lorsque les documents sollicités ont, comme en l’espèce, le caractère de documents administratifs.
La commission considère en outre qu’il lui revient, pour l’application de ces dispositions, d’émettre un avis tant sur le principe que sur les modalités du droit d’accès de l’intéressé, et qu’en l’absence de communication des documents sollicités, du fait d’un désaccord sur les modalités de cette communication, l’autorité administrative doit bien être regardée comme ayant opposé à l’intéressé un refus de communication, au sens de l’article 20 de la loi du 17 juillet 1978, dont ce dernier peut, en vertu du même article, saisir la commission.
La commission estime donc qu’elle est compétente pour examiner la demande d’avis de Monsieur X, qui est recevable.
Elle rappelle à cet égard qu’aux termes de l’article 4 de la loi du 17 juillet 1978, « l’accès aux documents administratifs s’exerce, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques de l’administration : / (...) c) Par courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous cette forme ». Si l’article R. 1111-2 du code de la santé publique, pris pour l’application de l’article L. 1111-7, prévoit en outre, lorsque les possibilités techniques de l’établissement le permettent, une consultation par voie électronique, distincte d’un envoi par courrier électronique, celui-ci n’est exclu par aucune des dispositions du même article, qui prévoient le libre choix du demandeur entre une consultation sur place et l’envoi de copies, délivrées sur un support analogue à celui qu’utilise l’établissement de santé ou sur papier, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques de l’hôpital.
La commission note par ailleurs qu’ainsi que le souligne le directeur du centre hospitalier universitaire de Bordeaux, la CNIL, par sa délibération n° 97-008 du 4 février 1997, « préconise que, dans le domaine de la santé, seules des messageries professionnelles sécurisées et recourant au chiffrement des données puissent être utilisées pour transférer des données médicales nominatives ». La commission estime toutefois que la lettre même de cette recommandation, rédigée, dans des termes qui ne sont pas sur ce point, impératifs, et à propos des transferts de données médicales entre professionnels, ne sauraient, en tout état de cause, faire obstacle à l’exercice par le demandeur de son droit d’accès aux documents à caractère médical qui le concernent, selon les modalités pour lesquelles l’article 4 de la loi du 17 juillet 1978 et l’article R. 1111-2 du code de la santé publique lui permettent d’opter.
Cependant, dès lors que le choix du demandeur n’exonère pas l’établissement de ses obligations légales en matière de confidentialité de l’envoi auquel il devra procéder sur sa demande, la commission estime qu’il était nécessaire, comme le centre hospitalier universitaire de Bordeaux l’a fait, d’avertir l’intéressé des risques que présentent les modalités de communication qu’il a choisies et souligne qu’il reste loisible à l’établissement, si ses possibilités techniques le lui permettent, de recourir pour l’envoi des documents en cause par courrier électronique, conformément au choix de Monsieur X, à leur chiffrement, sous réserve de l’envoi séparé au demandeur d’une clé ou d’un dispositif de déchiffrement utilisable par ce dernier.
La commission émet, dans ces conditions, un avis favorable à la demande de Monsieur X.

dimanche 17 novembre 2013

Psychiatrie et santé mentale : la HAS se fixe des objectifs sur trois ans



Saisie sur plusieurs thèmes de santé mentale par le ministère de la Santé, la Haute Autorité de Santé (HAS) a décidé de consacrer des travaux aux champs de la psychiatrie et de la santé mentale. Elle a identifié trois axes prioritaires pour les années à venir : la prise en charge de la dépression, le parcours des personnes en situation de handicap psychique, les droits et la sécurité en psychiatrie. Le suivi de ces travaux est assuré par un comité regroupant à la fois les institutions, les organisations professionnelles et les associations d’usagers. Ce comité s’est réuni pour la première fois à la fin du mois d’octobre.

La Haute Autoritéde Santé contribuera aux évolutions de la psychiatrie et de la santé mentale. Elle a adopté une démarche centrée sur l’organisation des parcours de soins des personnes atteintes de troubles mentaux autour de trois axes. Pour chacun d’entre eux des objectifs ciblés ont été fixés, qui répondent à des besoins des professionnels et des patients et correspondent à des leviers d’amélioration de la qualité des prises en charge.

La prise en charge de la dépression

Les travaux de la HAS ciblent le repérage des épisodes dépressifs et des troubles bipolaires, l’adéquation des traitements, médicamenteux et non-médicamenteux, ainsi que le renforcement du suivi des patients. Il s’agira en particulier de soutenir la mise en place d’une meilleure articulation entre psychiatres et médecins généralistes, en « première ligne » dans la prise en charge de la dépression.

Les parcours des personnes en situation de handicap psychique

Sur ce thème, il s’agit pour la HAS de promouvoir la coopération entre les différents acteurs (champs sanitaire, médico-social, social, éducatif, de la réinsertion professionnelle) afin d’assurer la continuité des prises en charge et d’éviter ainsi des ruptures dans les parcours de vie des personnes ayant une pathologie mentale chronique et en situation de handicap psychique. Un premier travail sur les certificats destinés aux Maisons Départementales des Personnes Handicapées, mené avec la CNSA[1] et l’ANESM[2], offrira des réponses pratiques aux professionnels de santé.

Les droits et la sécurité en psychiatrie

Les travaux prévus dans le cadre de cet axe doivent contribuer à la mise en place d’organisations et de pratiques assurant la délivrance de soins de qualité dans un cadre respectueux des libertés individuelles et faisant une place au légitime souci de sécurité. Un premier projet sur la prévention et la prise en charge des moments de violence dans l’évolution clinique des patients en hospitalisation psychiatrique sera réalisé. D’autres travaux sont prévus sur les soins sans consentement.

Une mobilisation de tous les acteurs, réunis pour accompagner les évolutions de la psychiatrie et de la santé mentale

Pour chacun de ces axes, la HAS ambitionne de diffuser et évaluer les bonnes pratiques en s’appuyant sur le travail des équipes pluriprofessionnelles, le décloisonnement des champs d’intervention (sanitaire, médico-sociale, sociale…) ainsi que sur la promotion des droits et de la place des patients et la reconnaissance du rôle et des attentes des aidants.
L’atteinte de ces objectifs suppose de travailler étroitement avec l’ensemble des acteurs concernés (professionnels, représentants des usagers, pouvoirs publics…), de promouvoir la complémentarité des travaux et d’envisager dès à présent les moyens qui permettront la mise en œuvre de ces productions dans la pratique quotidienne. Pour cela, la HAS a mis en place un comité de suivi du programme, présidé par le Docteur Yvan Halimi (CH de La Roche sur Yon) qui s’est réuni pour la première fois le 24 octobre dernier.

[1] Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA)
[2] Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm)

défaut de contradictoire et hospitalisation sous contrainte

La cour administrative d'appel de Lyon vient de réaffirmer que le préfet est tenu d'organiser une forme de contradictoire avec le patient lorsqu'il envisage de le priver de liberté. En effet le placement en observation durant 72 heures est une mesure privative de liberté (le patient est placé en hospitalisation complète durant toute la période d'observation. Ce premier acte administratif individuel mérite d'être pris en respectant les principes posés par le législateur.

A la fin des 72 heures d'observation, le préfet prendra un second arrêté (qui devra non seulement être motivé mais également être pris en considération des informations recueillies auprès du patient).

La Cour estime :

  Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 3211-3 du code de la santé publique prévoient que la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, mise à même de faire valoir ses observations avant chaque décision prise notamment en application de l'article L. 3213-1 et prononçant le maintien des soins ou définissant la forme de prise en charge ; 
que le renvoi à l'article L. 3213-1 vise nécessairement, contrairement à ce que soutient le préfet, tout autant la décision préfectorale d'admission aux soins psychiatriques, objet du I, que la décision, objet du II, sur la forme de la prise en charge devant intervenir dans un délai de trois jours francs suivant la réception du certificat médical de 72 heures ;

A noter, l'importance que le législateur accorde à l'intérêt du patient (citoyen et individu) qui doit être pris en considération en permanence. Or pour pouvoir tenir compte de l'individu pris en charge, il faut le connaître et pour le connaitre il faut lui permettre de faire valoir son point de vue.

Cela ne signifie pas l'obligation de le suivre pour autant.
En obligeant  (dès que possible) l'autorité administrative à recueillir les observations du patient, celle-ci aura une meilleure connaissance des conséquences de sa décision privative (ou limitative) de liberté. Enfermer une personne a des conséquences sur sa vie sociale et sur celle de ses proches.

 



 Voici l'ensemble de l'affaire

COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON

N° 13LY00455   
Inédit au recueil Lebon
4ème chambre - formation à 3

lecture du jeudi 17 octobre 2013
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 février 2013, présentée par le préfet de la Drôme qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202101 du 15 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 25 novembre 2011 portant admission en soins psychiatriques de Mme B...A... ;

2°) de rejeter la demande d'annulation de cet arrêté présentée par Mme A...devant le Tribunal administratif ;

Le préfet de la Drôme soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en fondant son jugement d'annulation sur la méconnaissance par l'arrêté du 25 novembre 2011 des dispositions de l'article L. 3211-3 du code de la santé publique, lequel dans sa rédaction résultant de la loi du 5 juillet 2011 a entendu écarter l'application de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et a créé une procédure particulière ne soumettant à contradiction préalable de la personne concernée que les décisions de maintien en soin psychiatrique et celles définissant la forme de prise en charge, à l'exclusion de la décision d'admission initiale ; qu'une telle décision ne peut être regardée comme le maintien de la mesure provisoire que peut prendre le maire sur le fondement de l'article L. 3213-2 qui n'est pas évoquée à l'article L. 3113-1 ; qu'en tout état de cause l'arrêté litigieux est fondé non pas sur le certificat des vingt-quatre heures qui n'est cité qu'à titre d'information, mais sur le certificat médical initial rapportant un état de Mme A...ne lui permettant pas de présenter utilement ses observations ; qu'aucun des autres moyens soulevés par Mme A...devant le Tribunal n'est fondé ;

[...]
1. Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du préfet de la Drôme du 25 novembre 2011 portant admission en soins psychiatriques de Mme B...A... ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3213-1 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de la loi du 5 juillet 2011, applicable au présent litige : " I.-Le représentant de l'Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil, l'admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'admission en soins nécessaire. Ils désignent l'établissement mentionné à l'article L. 3222-1 qui assure la prise en charge de la personne malade. / (...) le représentant de l'Etat dans le département décide de la forme de prise en charge prévue à l'article L. 3211-2-1, en tenant compte de la proposition établie, le cas échéant, par le psychiatre en application du dernier alinéa de l'article L. 3211-2-2 et des exigences liées à la sûreté des personnes et à l'ordre public. Il joint à sa décision, le cas échéant, le programme de soins établi par le psychiatre. / Dans l'attente de la décision du représentant de l'Etat, la personne malade est prise en charge sous la forme d'une hospitalisation complète. / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 3211-3 du même code : " Lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux fait l'objet de soins psychiatriques en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en oeuvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée. / Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7, L. 3213-1 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état. / En outre, toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale est informée : / a) Le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ; / b) Dès l'admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l'article L. 3211-12-1. / L'avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible. / (...) " ;

3. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 3211-3 du code de la santé publique prévoient que la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, mise à même de faire valoir ses observations avant chaque décision prise notamment en application de l'article L. 3213-1 et prononçant le maintien des soins ou définissant la forme de prise en charge ; que le renvoi à l'article L. 3213-1 vise nécessairement, contrairement à ce que soutient le préfet, tout autant la décision préfectorale d'admission aux soins psychiatriques, objet du I, que la décision, objet du II, sur la forme de la prise en charge devant intervenir dans un délai de trois jours francs suivant la réception du certificat médical de 72 heures ;

4. Considérant qu'il est constant que l'arrêté en litige du 25 novembre 2011 portant admission en soins psychiatriques de Mme A...est intervenu sans que celle-ci n'ait été mise à même de présenter des observations écrites ou orales ; qu'il ne résulte d'aucune des pièces du dossier, et notamment pas du certificat médical " de 24 heures " délivré le même jour et qui est visé par l'arrêté préfectoral, que l'état de santé de Mme A...n'aurait pas permis qu'elle soit informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir préalablement ses observations ; qu'à cet égard le préfet ne saurait utilement se prévaloir des termes du certificat initial délivré antérieurement, ce même 25 novembre, et au vu duquel le maire de la commune de Die avait décidé le placement provisoire de MmeA... ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Drôme n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 25 novembre 2011 ;


[...]

DECIDE :
Article 1er : La requête du préfet de la Drôme est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera, au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 000 euros à Me Belaiche, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle accordée à MmeA....
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la santé, au préfet de la Drôme et à Mme B...A....
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2013, où siégeaient :
- M. du Besset, président de chambre,
- M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,
- M. Dursapt, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 17 octobre 2013.
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N° 13LY00455


dimanche 20 octobre 2013

Ethique, une problématique européenne : Rapport du Sénat

 Le Sénat vient de rendre un rapport sur la problématique de l'éthique.
http://www.senat.fr/rap/r13-067/r13-067.html


"L'éthique est une démarche critique et interrogative qui puise ses racines dans la philosophie. Elle consiste en un questionnement de nos actions et de nos décisions. Ce faisant, elle vise à déterminer les fondements du « bien agir ».
Les sujets qui suscitent un questionnement éthique sont nombreux au sein de nos sociétés contemporaines. Or, le recours à la réflexion éthique permet de dépasser une logique d'action purement technique en aidant à définir le sens de ce que nous - individu et société - voulons faire. Elle contribue ainsi à éclairer la décision, particulièrement lorsque les actions humaines suscitent un conflit de valeurs.
L'Union européenne et le Conseil de l'Europe sont fondés sur des valeurs issues d'un héritage historique commun : le respect des droits de l'Homme, le respect de la dignité humaine, la liberté, la démocratie, l'égalité, l'État de droit. C'est à travers ces valeurs que ces deux ensembles institutionnels affirment leur dimension éthique.
Face à une demande sociale croissante en matière d'éthique, le présent rapport tente de répondre à la question de savoir si le projet européen, en s'appuyant sur ses valeurs, peut être le lieu et l'instrument d'un « mieux-disant » éthique."

plan de l'Etude: